Anonyme [1652], LA RELATION DE TOVT CE QVI s’est passé au Conseil de Monsieur le Prince, depuis son depart jusques a present, enuoyé à son Altesse Royalle. , françaisRéférence RIM : M0_3147. Cote locale : B_9_11.
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que d’esclater par des reproches, que M. le Prince n’auoit point
de foy, que M. le P. de Conty estoit sans courage, que sa fille meritoit
bien vn Pr. mais qu’elle vouloit que la recherche en fut tres-libre,
& que pour ce sujet elle mesme rõpoit ce mariage, & ne pretendoit
pas d’engager personne cõtre son gré à prendre sa fille, que
sa vertu seulement deuoit marier selon sa condition. Des lors elle
conçeut vne haine irreconciliable contre M. le Prince qu’elle a fait
depuis assez paroistre en toutes les occasions qu’elle en a trouué
comme nous verrons par la suitte.

 

Cependant M. le Coad. voyant échoüer ses esperances par l’éloignement
de M. de Chasteau-neuf & par la nullité de ce mariage,
dissimule ses ressentimens, & ne laisse pas de faire ses poursuittes
accoustumées pour le Chapeau de C. auec assez peu de reussi,
estant amusé d’vn costé par la Cour, & combattu de l’autre par
M. le P. il s’efforça par tous moyens possibles de gagner M. le Duc
d’Orleans, en luy donnant de l’aduersion du procedé de la Cour &
de la deffiance de M. le P. il eut d’abord assez de succez, & trouua
quelque part dans les bonnes graces de ce Prince tandis qu’il luy
parla du repos & de la tranquilité de l’Estat à quoy il donne tous
ses soins ; si bien que ce Prelat sembloit assez bien ménager l’esprit
de S. A. R. mais c’estoit pour l’engager insensiblement au party de
Madame de Chevreuse. Sur ces entreprises on donne les Sceaux à
M. le premier P. ce que M. le Duc d’Orleans n’ayant pas trouué
bon, en communique auec M. le Prince qu’on croyoit estre le meilleur
amy de ce nouueau Garde des Sceaux ; mais M. le Prince s’vnissant
de volonté à S. A. R. & ayãt proposé de remettre les Sceaux
entre les mains de M. le Chancellier à qui on les auoit ostez à son
occasion, on trouua juste de les luy rendre, tant pour contenter M.
le Prince que pour le desvnir d’auec M. le premier P. auec qui on la
veu toûjours mal depuis. Neantmoins comme la Reine ne declaroit
pas encor sa volonté là dessus, M. le Coad. alla trouuer M. le
Prince & luy proposa vn moyen qu’il croyoit fort conforme à la
[illisible] de son humeur, que ce P. pourtant rebuta auec beaucoup de
prudence. C’estoit de faire prendre les armes aux Bourgeois, d’aller
enleuer les Sceaux des mains du premier President, & marcher
en suite au Palais Royal, ce dessein, sur le refus que M. le P. en fit, ne
fut pas expliqué dauantage, mais enfin cette proposition fut faite,
soit que M. la Coad creust par là, gagner la faueur de M. le Prince
comme necessaire à ses desseins ; soit que se fust vn artifice de Madame
de Chevreuse pour remuer & pousser M. le Prince dans vn
danger si euident.



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