Anonyme [1649], LA MISERABLE CHEVTE DV MINISTRE D’ESTAT ESTRANGER. ET SON BANNISSEMENT, SA FVITTE premeditée, & sa retraite en Turquie. , françaisRéférence RIM : M0_2483. Cote locale : A_6_10.
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LA MISERABLE CHEVTE DV MINISTRE
d’Estat Estranger, & son bannissement, sa fuïtte premeditée,
& sa retraite en Turquie.

Enfin i’espreuue à mon dommage
que ce n’est pas sans sujet que l’on
compare le vice à vn abisme, dont il
est beaucoup plus aisé d’euiter la cheute,
que de s’empescher de tomberiusques
au plus profond, apres qu’on s’y est l’aisse choir.
C’est maintenant que i’apprens que tost ou tard, les
meschãs sont seuerement punis de leurs crimes. Que
sont deuenus mes flateurs, qui pour plaire à ma vanité
portoient n’aguere mes loüanges iusques aux
Cieux, afin que mon vol temeraire rendist ma cheute
plus dangereuse : imitant en cela l’Aigle, qui pour
auoir moins de peine à casser la Tortuë, l’esleue le
plus haut quelle peut, & la laisse tomber ? Ne deuois-ie
pas m’imaginer que ceux qui se trouuent d’abord
dans le comble d’vne felicité en sont plustost esbloüis
que soulagez, à l’imitation de ceux qui glacez d’vne
extreme froidure, & mis à la haste aupres d’vn grand
feu, en reçoiuent plus d’incommodité que de soulagement.
Il y a long-temps que ie me deuois contenter
d’vn volmediocre, sans mesleuer si haut ; mais puis
que i’ay reconnu la verité, & que ie n’ay pû regarder
sa lumiere, ne ressemble-je pas à la Chauue-sousris,



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