Le Solitaire [signé] = Arnauld d'Andilly, Robert [?] [1649], ADVIS D’ESTAT A LA REYNE, Sur le gouuernement de sa Regence. , françaisRéférence RIM : M0_498. Cote locale : A_2_16.
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les Parlemens, les grands Seigneurs, & les peuples sont vnis & en
bonne intelligence & concorde. Paris est en estat de se defendre contre
l’armée des vsuriers Partisans, & leur Generalissime le Cardinal
Mazarin. Nostre defense est iuste & legitime ; nous demandons
nostre Roy que l’on nous a rauy de nuict, & nous sommes armez pour
sa conseruation & celle de son authorité. V. M. ne void-elle pas les
precipices qui l’enuironnent, & dans l’abysme desquels elle ne peut
éuiter de tomber, si elle ne retourne dans le chemin d’vne bonne &
seure pacification ? Nous sommes en guerre ouuerte auec les estrangers,
ausquels nos diuisions ouuriront les portes de vos villes, &
l’entrée de vos Prouinces, V. M. doit auoir l’affection de mere pour
le Roy, & de Reyne Regente pour l’Estat ; elle est obligée d’abandonner
toutes les autres choses pour celles-cy. Nous ne pouuons
croire que V. M. voulust suiure les abominables Conseils que l’on
nous asseure auoir esté pris par le Cardinal Mazarin, & que pour
ruiner l’heritage du Roy vostre fils, vous eussiez la pensée d’abandonner
aux ennemis les aduantages que nous auons remportez sur
eux au prix de tant de sang & d’argent. Nous estimõs V. M. trop bonne
& pieuse mere & sage Reyne, pour croire qu’elle soit susceptible
de telles impressions & si funestes conseils, ny qu’elle voulust faire
perdre au Roy par vn infame traicté ce que l’on a pû conseruer par
vne paix honorable à la France. Il n’y a qu’vn moyen de restablir les
choses ; Que V. M. renuoye le Cardinal Mazarin en Italie, où il a
fait transporter plusieurs millions de vos Finances, & de celles de
vos peuples ; qu’il ioüisse des delices & des voluptez aux despens
de la France, de laquelle il a tant tiré de sang & de larmes pendant
son ministere. Qu’elle s’establisse vn conseil de personnes experimentées,
vertueuses & genereuses, esloignées de l’auarice & de
la rapacité ; non violentes, mais fermes pour prendre des deliberations
salutaires à l’Estat. Qu’ils soient hommes plus attachez aux interests
du Royaume, qu’aux leurs propres. Qu’elle banisse de la
Cour & du Conseil le nom & la fonction de premier, ou plustost
vnique ministre ; veu que c’est vn establissement qui conduit à la tyrannie,
qui ouure le chemin aux vsurpateurs, & qui a déthrosné la
premiere race de nos Roys, les premiers & vniques ministres ayant
esté suiuis par les peuples, & esleuez à la Royauté à cause de la nonchalance
des Princes. Qu’elle extermine de la Cour cette race de


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