Gondi, Jean-François Paul / cardinal de Retz [?] [1652], LE VRAY-SEMBLABLE SVR LA CONDVITE DE MONSEIGNEVR LE CARDINAL DE RETZ. , françaisRéférence RIM : M0_4081. Cote locale : B_10_7.
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occultes, alloit brauer les tempestes & donner la loy à tout le
Royaume ; Quand la posterité aprendra que Monsieur le Prince trouua
à son retour de Guyenne vne Armée de dix mille hommes composée de
vieilles Troupes, qu’il en prit possession par vn aduantage signale sur les
Trouppes du Mareschal de Turenne sans contredit plus foibles que les
siennes, qu’il entra dans Paris auec les nouuelles de cette Victoire, qu’il
fut receu au Parlement auec acclamation ; & quand la posterité verra
en suitte que tout ce Party s’est euaporé, que ces dix mil hommes
sont demeurez sans action, que ces dix mil hommes sont demeurez
sans Chefs, que ce qui en est resté n’a seruy qu’à faire passer en triomphe
deuant les Bourgeois de Paris les instrumens de leur ruyne ;
quand, disie, la posterité lira les deux parties de cette Histoire, elle aura
peine à se resoudre d’accuser le Cardinal de Retz d’auoir ralenty la vigueur
du Party, elle iugera sans doute qu’il y a plus d’aparence de rejetter
les manquemens que l’on a remarqué dans la conduite des affaires,
deuant que Monsieur le Prince fust venu de Guyenne sur ses creatures &
sur ses negotiateurs que sur Monsieur le Cardinal de Retz ; ils estoient
assez interessez à faire que Monsieur le Duc d’Orleans ne fust pas maistre
des choses, pour ne pas souhaitter qu’il y eust assez de vigueur dans
le Party pour le rendre independant de Monsieur le Prince, Chauigny
qui tiroit toutes ses forces de la protection & de la confidence de Monsieur
le Prince, selon les regles de la basse Politique dont il fait professiõ
luy vouloit conseruer, ou pour mieux dire, acquerir toute la consideration
qu’il auoit perduë par les mauuais succez de Berry & de Guyenne, il
peut tomber dans les esprits des hommes des soupçons assez raisonnables,
que la mesme conduite qui a esté tenuë par les Partisans de Monsieur
le Prince, deuant qu’il soit reuenu de Guyenne, pour le rendre absolument
maistre du Party, a esté continuée par luy mesme, pour ne pas
chasser le Mazarin, à la conseruation duquel il a trop d’interest pour le
perdre ; seroit-il croyable que si l’on eust agy de bonne foy, on eust laissé
deperir vne belle Armée, on eust pris des mesures si peu certaines auec
Espagne, on se fust chargé de la haine & de l’enuie que portent naturellement
des Traittez faits auec les Estrangers, & que l’on eust donné le
temps au C. M. de recueillir les fruicts qu’on en pouuoit tirer ? Y a t’il
apparence que Chauigny eust fait si bon marché de sa prostitution honteuse
du sacré caractere de Ministere, que d’estre le correspondant de Paris
à Bruxelles, & que ses negociations auec Espagne eussent si mal reüssi,
s’il n’eust ëu interest de les faire éclatter d’vn costé pour se donner de la
consideration à la Cour, & d’en empescher le succez d’autre part, pour
faire reüssir celles qu’il auoit auec le C. M. aura t’on facilité à se persuader
que le Cardinal de Retz se soit opposé à l’establissement d’vn Cõseil
qui n’est pas encor formé depuis cinq sepmaines, qu’il est de notorieté


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