Faure,? [?] = Arnauld d'Andilly, Robert [?] [1652], LA VERITE TOVTE NVË, OV ADVIS SINCERE & des-interessé, sur les veritables causes des maux de l’Estat, & les moyens d’y apporter le remede. , françaisRéférence RIM : M0_4007. Cote locale : B_17_13.
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traite auec Cromvvel, ce qui est le crime des crimes.

 

On luy donne des Lettres de Duc & Pair de France pour Montespan, parce
qu’il ne se peut rien adiouster à son infidelité enuers son maistre.

On luy donne asseurance de cent mil escus pour le Duc de la Rochefoucaut,
parce que pour le seruir il n’a perdu aucune occasion de desseruir son
Souuerain.

On restablit à sa priere le President de Maisons dans la charge de Sur-Intendant
des Finances, parce qu’il l’a exercé auec tant de suffisance & de probité,
qu’il a reparé en fort peu de temps les breches que ses grandes pertes au
ieu, & les immenses despenses de sa royale maison de Maisons, auoient faites
en son bien.

On donne en sa faueur vne grande somme au President Viole, parce qu’il
a esté Frondeur enragé dans Paris, Chef du Conseil des factieux endiablez de
Bordeaux, & Sur-Intendant des Finances pillées & rauies à force ouuerte
dans les receptes du Roy.

Et on luy accorde encore d’autres conditions non moins honteuses, &
mesme pour des femmes, que i’aurois honte de rapporter.

Cela se peut-il nommer vn accommodement de M. le Prince auec le Roy ?
Et ne seroit-ce pas plustost vn veritable partage de l’Estat fait entre le Roy &
M. le Prince ? puis qu’il deuiendroit par ce moyen Duc de Guyenne, Comte
de Prouence : maistre non seulement des places qu’il tient des-ja, mais de
toutes celles qu’il feroit conseruer à ceux qui ont merité par leurs des-obeїssance
de les perdre auec la vie ; Distributeur des Gouuernemens de Prouinces,
des Duchez & Pairies, des Offices de la Couronne ; & de tant de charges
importantes ; Egalement puissant sur la terre & sur la mer ; En pouuoir de se
vanger de ceux de toutes ces grandes prouinces sur lesquelles s’estendroit sa
domination, qui n’ont pas suiuy son party ; Et en estat de recommencer
quand il luy plairoit sous le mesme pretexte du Cardinal, ou sur quelqu’autre
vne nouuelle reuolte auec dautant plus dauantage, que cette exemple mille
sois plus pernicieux qu’on ne sçauroit croire, de donner à l’infidelité & au
demerite les recompenses qui ne sont deues qu’à la fidelité & au merite, attireroit
à luy tous les mechans, dont le nombre n’est que trop grand dans vn
siecle aussi corrompu qu’est le nostre, & decourageroit tous les gens de bien.
Ce qui le rendroit si formidable par luy mesme, qu’y ioignant encore le
secours qu’il pouroit tirer des Espagnols ses fidels alliez, qui apres auoir esprouué
que l’vnion de nos forces a porté leur Monarchie iusques sur le bord
du precipice, ne perdront iamais d’occasion de nous ruiner en nous diuisant ;
on pourroit dire auec verité qu’il n’y auroit pas seulement pour vn Roy en
France ; mais qu’il v en auroit deux, dont cét vsurpateur & ce tyran qui regneroit
au delà de la riuiere de Loire, pourroit exciter à toute heure vne nouuelle
guerre au Roy legitime, & allumer dens tout le reste de ses Prouinces
vn feu semblable à celuy qui embrase maintenant Paris, & qu’il entretient
& qu’il augmente auec tant de soin, pour faire tourner les choses au point
qu’il desire.

Le remede à vn mal si redoutable, & dont la seule pensée donne de l’horreur
à ceux qui n’ont pas perdu auec le iugement l’amour de leur propre salut
& de leur patrie, estant d’esloigner de bonne foy & pour iamais le Cardinal
puis que cela estant M. le Prince ne sçauroit pretendre que l’abolition du



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