Anonyme [1649], LETTRE DV CHEVALIER GEORGES DE PARIS. A MONSEIGNEVR LE PRINCE DE CONDÉ. , français, latinRéférence RIM : M0_2099. Cote locale : E_1_66.
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pour Pierre Landais fils d’vn Chaussetier, & fauory de François
II. Duc de Bretagne, & que les deux armées s’vnissent pour liurer
son semblable à la potence.

 

Nostre siecle a besoin de cet exemple pour esperer vn meilleur
gouuernement à l’auenir, & pour la consolation de ses souffrances,
& V. A. n’a que ce moyen pour r’entrer dans l’amour & dans l’admiration
des peuples. Apres cela, nous ioindrons toutes nos forces
pour contraindre les ennemis du dehors à nous offrir la paix,
que ce traistre a refusée à toute la Chrestienté, & nous recouurerons
vne nouuelle vie par vostre faueur. Autrement nous nous
tenons obligez à defendre nostre liberté, le repos de nos familles
& nos vies : C’est la preuue de la plus parfaite sagesse que de se resoudre
à tous les dangers, & de tout entreprendre pour le salut de la Republique :
nous sommes nez pour elle plus que pour nous, & nous ne pouuons
jamais mieux employer vne vie que nous deuons aussi bien au destin, qu’en la
sacrifiant à la patrie : C’est vne debte de l’eternité, que tout l’âge d’vn homme
ne peut acquitter.

Sapiens qui
omnia Reipublicæ
causja
suscipiennis
pericula putabit.
sæpe
ipse secum lequitur :
non
mihi soli, sed
etiam atque
adeò multo
potius, natus
sum patriæ,
vita quæ sato
debetur, saluti
pàtria potissimum
soluatur

quid est quod
a me satis ei
persolui possie.

Cie ad herun

Helas ! en quels termes serons-nous reduits de defendre l’honneur
de la Couronne, & de la nation contre ceux qui y ont plus
de part. Les fauoris ont accoustumé de briguer l’amour du peuple
pour opprimer plus facilement les Princes. C’est quasi la seule
marque, & le premier témoignage qu’ils doiuent donner de
leur puissance, & il y en a eu fort peu qui n’ayent eu quelque victime
de vostre Royale maison. Les témoignages en sont trop recens
de toutes parts, & en la personne mesme de Monseigneur le
Prince de Condé pere de V. A. qui n’en est échappé que par
bon-heur, & par vne prudence singuliere. Nous n’auons iamais
veu les Rois seuir contre leur sang si frequemment, que lors qu’ils
ont abandonné le gouuernail de l’Estat à quelque mignon. Si
les grands du Royaume ne se sousmettent seruilement à des commandemens
des honnestes, il croit qu’ils luy enuient sa fortune, &
les traitte en ennemis : mais comme cette administration, dont il
abuse, appartient naturellement aux enfans de France, quel milieu
peut-on trouuer entre ces deux oppositions, & que doit-on
penser d’vne alliance entr’eux, sinon au desaduantage de celuy
qui a le droit & l’authorité. Il est au pouuoir de Monseigneur le
Duc d’Orleans, & de vous, Monseigneur, d’abolir auiourd’huy
ce nom & ce ministere omineux qui a trop duré pour nostre bien,
& qui ne peut plus subsister apres tant d’exemples, qu’à l’abbaissement,



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