Anonyme [1649], LETTRE DV CHEVALIER GEORGES DE PARIS. A MONSEIGNEVR LE PRINCE DE CONDÉ. , français, latinRéférence RIM : M0_2099. Cote locale : E_1_66.
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examinez celle de l’accusé, voyez de quelles armes il est poursuiuy,
& si i’ose dire d’auantage, songez vne fois seulement que
Monseigneur le Duc d’Orleans & vous, estes inuestis par certaines
gens de sa cabale & qui courent sa fortune, qui vous obseruent
& vous obsedent ; pour empescher que la justice qui vous suit, &
qui vous tend les bras, ne vous puisse approcher. Il y en a sans
doute aupres de vous qui sont de sa liurée & qui craignent d’estre
liurez, qui sont à ses gages, & qui ne sont n’y a vostre Altesse ny
à la patrie. Ils se veulent auec luy mettre à l’abry du Sacré Sang
de nos Roys ; mais c’est en vain, & ie prie Dieu qu’il les choisisse
à vos costez sans qu’il vous touche de son foudre.

 

Vostre Altesse ne peut les garentir de sa valeur, ny de sa qualité,
contre celuy qui vous les a données, & qui peut bien vous empescher
de rien entreprendre sur les siens. Dieu oste souuent le courage
aux Princes ; mais nous le prions de vous conseruer le vostre,
& qu’il vous donne de meilleures inspirations, afin que nous ne
nous plaignions pas iustement de vostre fureur, & que vos ennemis
n’attribuënt pas à vne seule impetuosité, ce que vous auez
fait au de-là des frontiéres, comme ce que vous faites iniustement
aux portes de Paris, sans y auoir esté prouoqué, que par de
mauuais conseillers. Vous estes le seul Prince qui l’ait iamais
entrepris, & Dieu vueille que vous ne seruiez point d’exemple à
ceux qui viendront apres vous. Il est vray, que vostre Bisayeul
paternel en est venu là, & qu’il y fut defait par vostre Bisayeul maternel
qui mourut victorieux : mais ç’a esté pour sa querelle particuliere,
pour sa Religion, & contre la mesme faction de la Cour
que vous soustenez : encor en vsa-il comme vn enfant qui porte
respect à la maison de son pere, & nos ancestres nous ont appris
qu’il ne fut fait aucun desordre dans les villes & dans les maisons
mesmes éparses à la campagne, qui appartenoient à ses ennemis.

Cependant nous entendons que vostre armée n’a laissé à
commettre aucun acte d’hostilité par tout où elle a passé, &
qu’elle a fait dans Saint Denys, ce que le Turc n’a point commis
dans Hierusalem. Cette ville est dediée au Patron des Roys, de
la maison Royalle, & du Royaume de France, c’est le sanctuaire &
le Sacré depost de vos augustes Predecesseurs. Est-il possible que
vostre Altesse ait pû commander ou bien souffrir vn si sensible outrage
contre leur glorieuse memoire, & que le respect des cendres
du grand Saint Louis, de qui vous descendez, & dont vous



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