Anonyme [1652], LA CENSVRE ET L’ANTIDOTE DE QVELQVES MAXIMES tres-pernicieuses, contenuës dans vn libelle qui a pour titre, Le recit du duel déplorable entre Messieurs les Ducs de Beaufort, & de Nemours. Addressé à la Noblesse Raisonnable & Chrestienne. , français, latinRéférence RIM : M0_672. Cote locale : B_9_23.
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Ce combat inhumain est aussi contraire au bien & aux loix
de l’Estat, & partant le Souuerain ne peut qu’il ne le condamne
comme Chef de la Noblesse, parce qu’il le priue de l’appuy
de ses forces & de l’élite de ses sujets ; de plus, il destruit la
police en destruisant ses loix, à cause de l’impunité de ce crime,
procurée par tant d’artifices & par tant d’entremises, &
en outre il empesche l’execution de la Iustice, si bien qu’il
fomente le libertinage, l’insolence & la vexation : parce que
si on parle quelquefois de restitution de droict, vn querelleux
aussi tost vous demandera vn éclaircissement ; enfin il bannit
les sentimens de Religion, & rend les ames stupides & comme
letargiques en la Foy, & ainsi il introduit en l’estat toutes sortes
de desordres & de corruption. Mais qui est ce qui pourra
apres tant de brutalitez & d’abomination, trouuer de clameur
ou vne loy d’honneur en ce combat ?

Quant à ce qui est d’estre incompâtible auec le Christianisme
& le salut eternel, c’est où mesme les aueugles sont clairvoyans,
veu qu’il est si directement opposé à la doctrine de
Iesus. Christ, qui nous ordonne de bien faire à ceux qui nous
haïssent, de benir ceux qui nous maudissent, de prier pour
ceux qui nous calomnient, de laisser la tunique à celuy qui se
saisit de nostre robe, quand on nous frappe sur vne jouë, de
tendre encore l’autre, d’aimer nos ennemis, de laisser nos
presens à l’Autel, pour nous aller reconcilier auec nostre frere,
s’il a quelque chose contre nous, enfin il fait qualifier vn
Chrestien & mesme vn infidele proprement du nom d’Antechrist,
parce que si le Fils de Dieu a pris pour la marque de
ses disciples, l’amour mutuel des vns enuers les autres, ceux
qui ont des signes contraires sont de veritables Ante christs.
Mais cecy doit suffire pour contenter vn esprit raisonnable,
& contentons nous d’adjoûter ces paroles du Concile de
Trente en la Session 25. chapitre 19. que le detestable vsage
des duels introduit par l’œuure du Diable, à ce que par la mort sanglante
des corps, il butine la perte des ames, soit exterminé entierement
de la Chrestienté. Detestabilis duellorum vsus fabricante diabolo introductus,



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