Anonyme [1649 [?]], DISCOVRS SVR LA DEPVTATION DV PARLEMENT, A Mr. le Prince de Condé. , françaisRéférence RIM : M0_1147. Cote locale : A_2_30.
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pert le desir de conseruer sa liberté, il manque en premier
lieu par son pernicieux exemple, contre le deuoir qui l’attache
à la societé ciuille, il se trahit soy-mesme, & efface en
quelque sorte ce rayon d’independance que Dieu a graué
dans nos ames en nous formant à son Image, de ne recognoistre
point de Souuerain sur la terre en la conduitte de nostre
raison, & de nos pensees.

 

Mais quand ceux qui sont establis dans le Gouuernement
d’vn Estat pour estre les protecteurs de la liberté publique,
s’abandonnent tous les premiers aux tyrans qui les veut opprimer,
Quelle esperance peut-il rester de se pouuoir conseruer,
si ceux qui en doiuent estre les plus fermes appuis, la
vendent & la trahissent ? Nous apprenõs des Histoires que la
puissance des Empereurs Romains ne seroit iamais montée
au comble de l’insolence où elle a esté, si la lâcheté du Senat
n’eust fortifié par ses cõplimens infames les progrez de la Tyrannie :
Et surquoy il est important que les Officiers du Parlement
fassent vne serieuse reflexion. Ils doiuent prendre
garde que leur institution estant aussi ancienne que la Monarchie,
ils sont les dépositaires des Loix fondamentales
de l’Estat, & sont obligez en leurs consciences, & par le deuoir
de leurs Charges, de s’opposer aux entreprises des
Ministres & des Fauoris, & de renoncer plustost à leurs
dignitez que de souffrir que les loix soient violées. Il
n’appartient pas à la verité à des personnes priuées d’examiner
la conduite des Souuerains, mais pour ceux que
la necessité de leur employ engage de veiller à la seureté des
peuples, Qu’ils se souuiennent qu’ils respondront deuant
Dieu de la negligence qu’ils y apportent, & que toutes les
oppressions qui s’authorisent par leur tolerance criminelle,
leur seront quelque iour imputées. Si le Parlement eut fait
quelque reflexion sur ces deuoirs ; il n’auroit pas sans doute
deputé vers Monsieur le Prince : Car puisque ces marques
d’honneur ne se rendent qu’à la qualité des personnes, ou
bien à leur vertu ; il a esté desia obserué qu’il n’y auoit point
d’exemple qui l’obligeast à cette ceremonie, puis qu’on ne



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