Gondi, Jean-François Paul / cardinal de Retz [?]; Joly, Guy [?] [1652], SVITE VERITABLE DES INTRIGVES DE LA PAIX, ET DES NEGOTIATIONS de Monsieur le Prince à la Cour iusques à present. , françaisRéférence RIM : M0_1725. Cote locale : B_6_41.
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Pendant l’agitation de ce differend, Monsieur le Prince s’imagine
comme la premiere fois, que plus il échauffera les affaires,
plus il rendra le Cardinal flexible à ses demandes ; dans
ce dessein il fait adroitement proposer à son Altesse Royale la
Lieutenance generale, le changement du Gouuernement de
la Ville, & les Taxes sur les Bourgeois, comme vne derniere
démarche propre à vaincre dans l’esprit du Cardinal tous les
obstacles qui luy estoient opposez.

Quoy que ces extremitez pussent estre vtiles dans le fonds
pour l’éloignement du Cardinal, il est aisé de juger qu’elles
n’ont pas esté prises par Monsieur le Prince pour ce dessein,
puis qu’outre qu’elles n’ont esté suiuies ny soustenuës d’aucune
execution, ce qui estoit assez facile, l’on a bien cognu
dans le Parlement lors que Monsieur le Prince y a pris sa seance,
& que l’on a deliberé pour faire le fonds des cinquante mil
escus, qu’il a fait tout a pû pour empescher que ce fonds ne fust
pris par preference, sa pensée n’estant pas de haster l’execution
de l’Arrest de la teste à prix, mais seulemẽt de tirer du Cardinal
par la peur, & par la force & la consideration du Party
les aduantages qu’il en espere.

Cette intrigue & cette souplesse de Monsieur le Prince & de
ses confidents n’a pas eu mesme succés dans l’esprit du Cardinal
que les premieres violences de l’Hostel de Ville, outre que
la mort de Monsieur de Boüillon a donné quelque changement
aux affaires de Monsieur le Prince dans le cabinet ; le
Cardinal n’a pû se resoudre de se mettre si absolument entre
ses mains, & a tousiours bien iugé qu’il y auoit peu de seureté
à son retour, s’il ne differoit l’execution des conditions particulieres
dont il estoit demeuré d’accord.

Pour se deffaire donc aucunement de l’empressement des
Agens de Monsieur le Prince, qui parossoient ne vouloir
acheuer aucune chose, si ce qui regardoit les interests n’auoit
son effet des le moment de sa sortie, il s’aduise de faire publier
tout d’vn coup son esloignement, & tasche de persuader à
Monsieur le Prince qu’il est prest de faire sa retraite, & mesme
sans aucun concert auec luy, feignant d’y auoir esté porté par
les negotiations de ceux qui tiennent le Parlement à Pontoise.

Cette contre-ruse a admirablement bien reüssi au Cardinal,
& Monsieur le Prince a si fort apprehendé d’estre priué des aduantages



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