Brousse, Jacques [?] [1649], LETTRE D’VN RELIGIEVX, ENVOYÉE A MONSEIGNEVR LE PRINCE DE CONDE, à S. Germain en Laye. Contenant la verité de la vie & mœurs du Cardinal Mazarin. Auec exhortation audit Seigneur Prince d’abandonner son party. , françaisRéférence RIM : M0_1895. Cote locale : C_3_76.
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Mazarin, que l’on dit que vous fauorisez de vostre protection ; ce que nous ne
croyons pas, n’y ayant point d’apparence qu’vn Prince, tel que vous estes, qui a
sceu par son trauail vnir si parfaitement la science, la vertu auec la generosité : qui pratique
les Vertus Morales, Politiques & Chrestiennes auec vn si parfait exemple : qui
s’est acquis tant de gloire par ses victoires, qu’il semble auoir enseuely la memoire des
Alexandres & des Cesars, tombast dans cét aueuglement estrange, de vouloir volontairement
faire perte de son honneur & de sa conscience, en se faisant l’appuy de l’ennemy
de son Roy & de son Estat. Iugez, Monseigneur, si ce malheur arriuoit ce qu’on
diroit de vous, ce qu’on diroit de nous ? Vous sçauez que nous ne sommes pas sans
enuieux & sans ialoux, qui fauorisez de quelques exemples ne manqueront point de
publier que c’est le fruict de nostre mauuaise education pour les mœurs, & de nostre
doctrine, non seulement accommodante, mais dangereuse pour la seureté des Roys,
l’authorité des Magistrats, le repos des Peuples, & l’integrité du commerce public.

 

De vous aussi, quel moindre iugement en pourroit on faire, sinon que degenerant
à vostre naissance, & à la gloire de la race des Bourbons, vous voulez par vn caprice
inconceuable effacar de l’Histoire la memoire de vos belles actions, pour vous rendre
complice & compagnon du plus vil & du plus infame de tous les hommes ? Ne souffrez
donc point que le iugement que l’on doit faire de vostre conduite soit plus long temps
en suspend, à vostre propre detriment & à celuy de tant de millions d’ames, qui patissent
sous cette violence tyrannique. Ostez à ces Estrangers & Ennemis de l’Estat cette folle
persuasion & ce dernier refuge qui leur reste, que vous perdrez la France & vous-mesmes
pour empescher qu’ils n’ayent ce qu’ils meritent. Souuenez vous de tant de genereux
exploits en Flandres, en Allemagne, en Catalogne ; de tant de Batailles gagnées
& de Villes forcées, & ne donnez pas lieu aux Histoires Estrangeres, quand les
nostres par consideration ne le voudroient pas faire, d’apprendre à la posterité, que
vous auez couronné tant de belles actions par la plus lasche de toutes celles, qui peuuent
partit d’vne personne de vostre condition : Et qu’apres auoir bien fait du mal au
Roy d’Espagne, en le dépoüillant de ses Villes & de ses Prouinces, vous luy auez fait
la restitution au centuple, en tournant la force de vos armes contre la France, afin de
la luy liurer entre les mains, par la desolation que vous y meditez, & que vous commencez
auec ce malheureux ; Qui voyant qu’il n’y a plus de lieu pour les vols, ny de
seureté pour sa personne, veut la perdre auant que de partir ; ou s’il n’en peut eschaper
que par la mort, dresser vn Mausolée à ses cendres, des ruines de Paris, & du reste de
l’Estat.

Quittez, Monseigneur, quittez cét insolent auec ses pretentions barbares & criminelles !
Traittez ce cerueau des monté en habitant des Petites Maisons ! Riez-vous des
fumées de cette bile qui luy, inspirent des resueries si extrauagantes & si pernicieuses !
Saisissez vous de cét Ennemy du Roy, & peste de son Estat, & le conduisant captif au
derriere de vostre carrosse, quoy qu’il ne merite pas cét honneur, venez à Paris acheuer
son procez auec ces vertueux & sages Seuateurs, & luy faire souffrir & à tous ses
adherans, les iustes peines deuës à leurs demerites, pour vn exemple eternel aux Estrangers,
aux orgueilleux, & aux mauuais François. C’est par vne action si loüable, si genereuse
& si saincte, que vous meriterez les faueurs du Ciel, la gloire d’vn Prince du
sang Royal, les loüanges de toutes les Nations, les benedictions de toute l’Eglise, les
congratulations de toute la France, auec les prieres de toute nostre Congregation, &
de tout le Monde.

FIN.



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