Bourbon-Condé, Anne Geneviève de (duchesse de Longueville) [?] [1650 [?]], APOLOGIE POVR MESSIEVRS LES PRINCES, ENVOYEE PAR MADAME DE LONGVEVILLE A MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS. , françaisRéférence RIM : M0_126. Cote locale : B_6_48.
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& il s’estoit engagé de demander ce Gouuernement pour luy. Cependant
le Cardinal Mazarin afin de monstrer que ce Prince n’auoit pas
seulement le credit de faire accorder les choses iustes, apres luy auoir desia
fait refuser le Gouuernement de Dunkerque pour le mesme Monsieur de
Chastillon, & celuy de Bergues pour Monsieur de Marsin, luy fit refuser
encore cette derniere demande ; & auec l’estonnement vniuersel des honnestes
gens, sans songer qu’il l’offençoit, sans se soucier des interests de
l’Estat, sans preuoir à la seureté de nos conquestes, establit dans Ypre vne
de ses creatures qui venoit de perdre Courtray, & qui perdit Ypre ensuite.
Qu’il n’appelle donc plus Dieu à tesmoin de ce qu’il n’a rien obmis pour
procurer l’auantage & la satisfaction de nostre Maison, puisque n’ayant iamais
rien negligé de ce qu’il a creu la pouuoir destruire, comme vous auez
desia veu ; nous esperons que Dieu sera le Iuge seuere de sa perfidie. Quant
au consentement qu’il dit que Monsieur le Duc d’Orleans a apporté aux
biens que l’on a faits à Monsieur mon Frere, c’est vn tesmoignage que
nous tenons d’autant plus veritable, qu’il nous vient de la main de nos ennemis,
que son Altesse Royale a reconnu son merite, & qu’elle n’a rien
trouué dans les choses qu’on faisoit pour ce Prince qui fust contraire à l’Estat.
Iusques icy, MESSIEVRS, i’ay respondu à ce qu’on a voulu nous
obiecter pour nous accuser d’ingratitude ; & ie croy l’auoir fait de sorte,
que ie n’ay laissé aucun lieu de nous la pouuoir reprocher qu’iniustement.
I’ay examiné la nature des graces que nous auons reçeuës, leur circonstances,
les conionctures des affaires qui nous les ont procurées, la force
du droict & la justice des pretentions que nous y auions, afin que tout le
monde en estant instruit, conneust clairement auec quel excés de malice
nos ennemis, ou cachant ou alterant ces choses, les auoient changées. Et
qu’il n’y auoit point d’artifice qu’ils n’eussent employé, ny de mensonge
qui ne leur eust semblé honneste pour attirer sur nous cette haine des gens
de bien, qui suit d’ordinaire les ingrats. I’espere, MESSIEVRS, que sur
ce premier point vous nous aurez fait justice, & que la candeur & la sincerité
dont i’ay vsé iusques icy dans ce discours ne vous auront pas dépleu.
Ie viens à cette heure à la seconde partie de l’accusation du Cardinal Mazarin :
Et comme elle est fondée sur des crimes qu’il inuente, & sur de
bonnes actions qu’il explique en mauuais sens. Ie m’asseure que i’auray
encore peu de peine à triompher de ces monstres imaginaires, & que ie
renuerseray aisémẽt le blâme de la calomnie sur celuy qui en est l’autheur.

 

L’on n’accuse que les pretentions de Monsieur le Prince, tant ses
actions sont innocentes ; ses pretentions se trouuent si iustes que ses ennemis
sont contraints de luy en supposer de fausses : Et celles-cy sont si
peu croyables qu’il ne faut que les raconter pour les destruire. C’est pourquoy
sans m’efforcer d’appuyer de raisons des veritez qui n’ont point besoin
de l’estre, ie me contenteray de dire les choses comme elles se sont



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