Bourbon-Condé, Anne Geneviève de (duchesse de Longueville) [?] [1650 [?]], APOLOGIE POVR MESSIEVRS LES PRINCES, ENVOYEE PAR MADAME DE LONGVEVILLE A MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS. , françaisRéférence RIM : M0_126. Cote locale : B_6_48.
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peril qu’il auoit couru de la conclusion de la Paix, respondit de sorte qu’il
n’y eust plus de moyen de restablir le Traitté. Et afin de rejetter dauantage
les choses dans la confusion, il fit agir auprés du Duc de Lorraine, pour le
separer des interests de la Maison d’Austriche, & pour l’obliger à continuer
la guerre dans nostre party. De sorte que par le mesme ordinaire qui
apporta de la Cour la negatiue du Cardinal Mazarin, le Duc de Lorraine
enuoya de Bruxelles vne lettre que Madame la Duchesse d’Orleans luy
auoit escrite, & qui fut leuë à Munster en pleine assemblée ; par où elle luy
mandoit, que s’il vouloit quitter les Espagnols qui l’abandonnoient, &
seruir le Roy de sa personne & de ses Trouppes, non seulement elle luy
feroit rendre la vieille Duché de Lorraine, mais encore tous ses Estats :
faisans receuoir l’affront à nos Plenipotentiaires, qu’on pouuoit les accuser
de la continuation de la guerre, & d’vne conduite pleine de duplicité
& de perfidie. Les Plenipotentiaires des Estats qui voyoient vn artifice
succeder à vn autre, n’attendant plus rien de la mauuaise foy du Cardinal
Mazarin signerent leur Traitté. Mais comme ils ne pouuoient nous quitter
sans tenter toutes les voyes de ramener ce Ministre à resipicence, &
qu’ils conseruoient encore quelque foible esperance, que cét homme
voyant la France priuée de leur secours, se porteroit enfin à agir selon son
deuoir & sa conscience, se reseruerent trois mois pour la ratification de
leur Traitté : Pendant lesquels ils stipulerent des Espagnols, Que nous serions
receus à la conclusion de la Paix, aux conditions qu’ils nous l’auoient
offerte, si nous y voulions entendre. Mais le Cardinal Mazarin passant
par dessus toutes les bornes de l’honneur ; & ne voulant pas que nos
miseres finissent, ny qu’il nous restast la moindre esperance de quelque accommodement :
Aussi-tost que Messieurs les Plenipotentiaires des Estats
eurent signé, osta tout espoir de negotier ; & fit protester par Monsieur
Seruien que nous ne nous tenions plus aux choses que nous auions accordées.
Et cela auec tant de mauuaise foy & de crime, que Monsieur mon
mary, malgré lequel on faisoit ces choses, nous voyant en opprobre & en
execration à tous les Peuples, quitta l’Assemblée & reuint en France : &
auec tant de passion du costé du Cardinal Mazarin, que Monsieur Dauaux
fut disgracié pour n’auoir pas approuué ces iniustices : & que moy mesme
au retour de Munster ne celay point au Palais Royal de quelle sorte les
choses s’estoient passées, en meritay la colére de la Reyne qu’il auoit
preoccupée sur ce sujet. C’est ainsi, MESSIEVRS, que la Paix de Munster
a esté troublée, & aussi depuis ce temps-là, les Espagnols n’ont iamais
voulu reprendre le Traitté auec si meschant homme. Car soit qu’ils se
soient adressez à la Cour pour renoüer quelque pourparler ; le sieur Piquet
y a declaré de la part de Monsieur le Comte de Pigneranda (qui s’est
depuis mocqué de ce Ministre à Cambray) qu’il ne la vouloit negocier
qu’auec Monsieur le Prince ; mais point du tout auec cét infidelle : soit


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