Anonyme [1649], LA CONFERENCE DV CARDINAL MAZARIN AVEC LE GAZETIER, Iouxte la coppie Imprimée à Bruxelles. , françaisRéférence RIM : M0_742. Cote locale : C_1_19.
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certaines de ce qui se passoit, que ceux-cy n’ayent donné des Arrests,
celles-là ne se soient souleuées, & tous ensemble n’ayent demandé
l’vnion auec celuy de Paris, & n’y ayent esté receus. Regarde
si tu prends bien tes mesures, & si tu peux gagner de la creance
sur les esprits, en leur debitant à souz main toutes ces menteries,
au mesme temps que les Colporteurs crient & debitent par
les ruës, les Arrests d’vnion des Parlemens & des Prouinces contre
moy, auec plus de raillerie qu’ils ne feroient pas s’ils, parloient de
Scaramouche ou de Iodelet. Considere ie te prie si c’estoit bien
la saison d’épouuanter les Parisiens par les troupes imaginaires du
Comte de Harcour, cependant qu’on publioit hautement la chasse
qu’on luy donnoit de tous costez, auec les prises des villes iusques
à la porte du Havre par les sieurs de Longueuille & de Matignon :
Tu n’auois qu’à adiouster ce qu’à dit l’Autheur Burlesque
des Baricades, que Konismarc estoit à Sainct Cloud, le Roy Hugon
deuant Bicestre, & le Poisson Clas sur la Seine à la teste d’vn
milion de Baleines, armées chacune de dix canons de cent cinquante
liures de calibre. Tu me ferois rire autant que iamais, si i’auois
moindre sujet que ie n’ay pas de pleurer.

 

Gaz. Ie voy bien que V. E. est en mauuaise humeur, & si ie
croyois qu’elle y deust perseuerer, ie prendrois resolution de ne
plus rien faire que sur les memoires qu’elle me donneroit en
main propre, car i’auois communiqué ces pieces à Messieurs Le
Tellier, Bautru & de Lyonne, qui les auoient trouuées rauissantes
& puissantes pour nostre dessein : de façon que i’en
attendois vn pareil applaudissement de vostre Eminence.

Le Card. Il y a des voyes plus faciles, moins dangereuses & plus
asseurées. Quand on veust faire vn bon coup, il ne faut pas si fort
sonner la trompette : la trop grande publication de ses forces, met
les ennemis en defiance, & les oblige de se tenir sur leurs gardes.
Il falloit seulement semer en secret parmy les Bourgeois, que ie ne
respirois rien tãt que leur repos : que i’étois dans la resolutiõ de les
soulager : qu’ils estoiẽt esclaues souz les Generaux : que l’on vseroit
de violence en leur endroit, apres qu’ils auroient payé les taxes
volontaires : que la guerre leur coustoit desia plus en deux mois,
que ne feroient pas les impositions d’vne année : qu’ils deuoient
s’assembler secrettement, & au lieu d’aller en garde aux portes venir
fondre sur le Parlement, l’obliger de tenir son ban, & de se retirer
au lieu de son exil, & puis s’en venir à Sainct Germain, où ils



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