Anonyme [1652], LA CONFERENCE SECRETTE, TENVE A PONTOISE ENTRE LE ROY, LA REYNE, Le Cardinal Mazarin, Messieurs les Princes, & plusieurs autres Grands Seigneurs de la Cour. , françaisRéférence RIM : M0_745. Cote locale : B_15_3.
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ie me iettay tout librement sur l’herbe, dans vn
lieu assez couuert, de peur d’estre inquieté par
la rencontre des autres.

 

O que i’estois content de me voir tout seul
loin de l’embaras du monde & de la Cour ; mais
que cette satisfaction dura peu, & que ie me vis
tout à coup surpris, lors que i’y pensois le moins
ie m’endormis pourtant assez agreablement agité
de differentes imaginations tantost le magnifique
balet d’Orphée, & l’illustre tragi comedies
d’Endromede, me repassoient dans la
memoire comme si ces choses meussent esté encore
presentes, & il me sembloit voir le Cardinal
Mazarin rire en sa barbe, à la veuë de ces
magnificences, dont il se glorifioit d’estre l’Auteur,
ie me figurois, des siecles d’or plus d’vn
Million, sous son Ministere, ie me fondois
sur ce qu’il commençoit par les ris, les ieux
& la danse qui sont les ordinaires compagnes de
de la felicité. Ie remarquois comme il faisoit
tous les soirs arrouser à ses despends, le cours de
la Reyne, & ie le voyois desia transformé en vn
delicieux par terre : où il deuoit semer tous les
escus de France, i’admirois ces superbes bastiments,
pour ses Eminentissimes Cheuaux
& ie disois desia qu’elles maisons fera-t’il
pour habiter des hommes, ainsi ie resuois
fort agreablement pour l’auenir. Au milieu
d’vn si doux sommeil, quelque bruit importun



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