S. D. L. [signé] [1649], SVITTE ET SECONDE LETTRE DV BON PAVVRE. A LA REYNE REGENTE. , françaisRéférence RIM : M2_195. Cote locale : A_5_45.
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son esprit qu’elle a laissé porter à des choses si
ennemies de la charité, les prieres qu’elle fait, peuuent
estre exaucées.

 

Entre les aduantages que ie tire de ma pauureté
volontaire, celuy de la liberté, est le plus grand : car
n’ayant rien à perdre, tandis que vostre Majesté
craint toutes choses, pour elle, pour le Roy, pour
l’Estat, & enfin pour tout ce qu’elle estime & cherit
le plus au monde, ie suis entierement libre de parler,
mesme à la face de tous les Roys de la terre, sans crainte
d’estre confondu. Tous tant qu’ils sont, MADAME,
ils pensent estre les Maistres absolus du Glaiue
de Dieu, bien qu’ils n’en soient proprement que les
porteurs ; au lieu de prester sagement l’oreille à ses
conseils, ils la luy ferment, pour l’ouurir aux laches
tromperies de leurs flateurs.

Si ce ne sont ceux-cy qui vous ont enseigné la
cruelle maniere de faire de nouueaux pauures, se peut
il bien faire, MADAME, que vous mesme l’ayez inuentée ?
Helas ! c’est où vous auez miserablement
reüssi.

Vous auez crû ne pouuoir mieux faire, que de les
mettre au chemin, où ie me suis placé pour aller droit
au Ciel ; mais en leur ostant les moyens de faire du
bien, qui en est vn des plus asseurez pour y paruenir,
vous ne leur auez pû donner la grace du desir de la
pauureté, sans lequel on n’y peut auoir de merite.

Au contraire la misere où l’on a tasché de les reduire,
leur seroit vn subjet de desespoir, s’ils ne sçauoient
qu’ils ne peuuent aspirer à la perfection de la



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