Polichinelle [signée] [1649], LETTRE DE POLICHINELLE A IVLE MAZARIN. , françaisRéférence RIM : M0_2045. Cote locale : C_3_94.
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vous a voulu racourcir les aisles. Cela n’a point empesché
que vous n’ayez pris la fuitte : mais, graces à
Dieu, vous n’estes pas allé loing, & mal-gré vostre
grand vol, gardez que l’on ne vous tire en volant :
ne vous esleuez pas tant : car ceux qui tombent de
bien-haut, sont en danger de se faire bien du mal ;
l’en parle par experience, si ie ne fusse iamais monté,
ie ne serois iamais tombé sur mon rien, qui depuis
ma cheute est tousiours demeuré crochu : tenez-vous
mieux que moy, si vous pouuez, dautant
que quand on vous void chanceler, comme vous
faites, tout le monde dit desia, voila l’Eminence à
bas. Ie ne sçay pas ce que vous auez fait au monde,
mais chacun vous pousse pour vous faire choir. Ie
ne sçay pas si les bruits qui courent de vous sont
veritables. Si cela est, ie pousseray la rouë de vostre
fortune auec les autres, apres l’auoir long-temps
tirée sans l’auoir pû entraisner. On dit que
vous estes vn perturbateur du repos public, & il
est vray, puis que vous courez toute la nuict comme
vn Lutin, tesmoin celle des Roys, que vous
fistes tant de rumeur, lors qu’on ne pensoit qu’à se
resiouyr & à se reposer : Et moy-mesme qui fus le
Roy de nostre trouppe, ie fus contraint de m’aller
cacher tout effrayé à la ruelle du lict, quand on
nous vint dire que vous enleuiez les Roys. On
vous prend dans Paris pour vn affameur de petits
enfans, qui vous nommẽt grand Goliat : si ie viens
à auoir faim comme eux, ma fonde iouëra son ieu,


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