D. P., sieur de S. [signé] [1649], LETTRE D’VN VERITABLE FRANÇOIS, A MONSEIGNEVR LE DVC D’ORLEANS. , françaisRéférence RIM : M0_1898. Cote locale : C_3_50.
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dernieres actions ont obscurcy leur splendeur & souillé leur esclat :
& la renommee qui sembloit n’auoir pas assez de bouches
pour publier vostre gloire, est demeuree sur ce suiet muette, &
n’a plus de voix que pour apprendre à tout l’Vniuers que vous
auez quitté le nom de pere de la patrie pour prendre celuy de
persecuteur. En effet, que dira la posterité (elle qui iuge sans
peur des actions des Princes) lors qu’elle sçaura que V. A. R. a
tourné ses armes cõtre celle, que elle auoit si souuent courõnée
& qu’elle a pris plaisir de teindre ses lauriers du sang des fidelles
François, au lieu qu’ils ne deuoient estre arrosez que de celuy
de ses ennemis. Elle rougira sans doute, MONSEIGNEVR,
aussi bien que le siecle où nous sommes, & elle ne pourra croire
qu’auec peine, que vous ayez trauaillé à renuerser vne Couronne
a laquelle vous pouuiez pretendre par le priuilege de
vostre naissance Mais ce qui augmentera encore son estonnement,
ce sera lors qu’elle considerera que V. A. R. ne s’est armee
que pour la deffence d’vn Ministre Estranger, ou plustost
du Tyran de la France, qui met les desolations des Prouinces &
les supplices des hommes, entre les ornemens de sa bonne fortune ;
qui opprime les Loix par la violence & estouffe la liberté
par l’autorité ; qui vsurpe toute la puissance Royale & ne pardonne
qu’au seul nom de Roy ; & qui enfin comme vn nouueau
monstre ne vit que des agonies des Peuples & ne boit que leurs
larmes. De telle façon, MONSEIGNEVR, que du plus haut
point de la liberté ; ou nous estions montez, nous tombons dans
le dernier degré de la seruitude ; & nous auons ce regret de voir
triompher de nos vies & de nos biens vn inconnu, en qui le hazard
a esté plus fauorable que la prouidence de ses parens, & en
qui la fortune plustost que le merite a releué la bassesse de la
naissance. Le Parlement de Paris, MONSEIGVEVR, cette
illustre Compagnie qui tient entre ses mains la garde des loix &
la tutelle du Royaume, auoit creu qu’il estoit de son deuoir de
s’opposer à ces violences, & de prester ses mains à soustenir les
ruines qui menaçoient la Monarchie : il a pour ce suiet recours
à de tres-humbles remonstrances ; il employe tous les mouuemens
de l’éloquence & tout ce que l’ardeur de son zele luy peut
suggerer, pour rendre sensible la Reyne Regente aux plaintes
& aux souffrances de son peuple. Mais il trouue que le Cardinal
a desia porté l’endurcissement dans le cœur de cette sage Princesse.


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