Caussin, Nicolas (R. P.) [signé] [1649], LETTRE DV R. P. N. CAVSSIN DE LA COMPAGNIE DE IESVS. A VNE PERSONNE ILLVSTRE Sur la curiosité des Horoscopes. , français, latinRéférence RIM : M0_2132. Cote locale : C_3_75.
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iugement des Astres, & que les loix permettent ; mais ie parle
de ces Promethées qui se vantent d’auoir rauy le feu de son
throne, de ces Monarques des temps, qui veulent faire rouler
nos auantures & nos iours infailliblement soubs leurs
loix.

 

Dieu n’a pas donné le Ciel en proye à la curiosité des hommes,
mais il a tendu vn voile de tenebres deuant ces grands
Palais de clarté, pour n’y admettre pas indifferemment les
yeux profanes. C’est chose estrange qu’il y en a qui se promettent
de nous dechiffrer les destins des hommes, leurs
qualitez, leurs succes, leurs honneurs, leurs richesses, leurs
maladies, leurs disgraces, & leur mort, comme s’ils escriuoient
vne histoire & non pas vn Horoscope : ils ne se contentent
pas de dire les accidens, mais ils se persuadent d’en
marquer les temps par heures & par minutes, comme si
cette eternelle Prouidence leur auoit mis ses sçeaux entre
les mains.

Comment pouroient-ils donner ce qu’ils promettent, ou
dire seulement ce qu’ils professent ? Le Ciel est vne cause
vniuerselle qui est determinée par les causes secondes,
& qui ne faict non plus les choses particulieres, que le soufle
des Orgues la distinction des Cantiques. Le Soleil fait auec
l’homme vn homme, & auec le lyon vn lyon ; tous les Astres
operent, ou cessent d’operer, selon la disposition qu’ils rencontrent
dans la nature inferieure. Les peres & meres, les
nourrices, l’education, la patrie, la coustume, la loy, la conuersation,
le franc-arbitre, & la prouidence qui est sur tout,
peuuent empescher à toutes heures les effets des constellations.
Ils commettent nos vies à peu de planettes & peu d’estoilles
fixes, comme si tant de flammes celestes deuoient
estre perpetuellement oysiues sur nos testes. Les mouuemens
de ces planettes sont encores incertains. & les plus sçauans
disputent eternellement sur leur calcul. Les estoilles non errantes
ne se retrouuent plus au point auquel l’antiquité les a
autresfois obseruées. La vie de l’homme ne suffit pas à ces obseruations,
nous sommes trop bas, & le Ciel est trop haut pour
n’y trouuer point de mécompte : c’esticy que l’art est long, &



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