Anonyme [1649], SERMON DE L’EVCHARISTIE POVR L’OCTAVE DE LA FESTE-DIEV. PREMIERE PARTIE. Preschée par le R. P. A. D. , français, latinRéférence RIM : M4_78. Cote locale : C_10_8.
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S. Paul voulant nous apprendre à nous vanger de nos ennemis
nous en donne les moyens par ces paroles dignes
de son excellent esprit, sie suriuit inimicus tuus ciba illum, si
sit it potum da illj, hoc enim faciens carbones ignis congeres super
caput eius. Si ton ennemy a faim donne luy à manger, si
la soit le presse donne luy à boire, & ces faueurs extraordinaires
qu’il n’attendoit pas de ta bonté irritée deuiendront
des charbons allumés qui embraseront son cœur, luy ouuriront
les yeux pour luy faire voir que tu paise son ingratitude
auec des biens-faits & des tesmoignages d’amour.
C’est de la sorte, dit le docte Rupert, dont Iesus-Christ vange
l’indigne communion de Iudas. Le corps & le sang de
son maistre qui sont des charbons d’amour, & de biẽ-vueillance
deuiennent dans la bouche de cét ingrat des feux de
colere, de hayne, & de damnation. Ouy Chrestiens, ce
memorial de tous les misteres que nous adorons, l’abbregé
de touslles bien-faits que nous auons receu de la main liberalle
de Dieu, le cabinet où sont renfermés toutes ses richesses,
& tous ses tresors, comme parle l’Apostre S. Paul,
in quo absconditi sunt omnes thesauri sapientiœ, & scientiœ
dei, iette autant de charbons sur nos testes criminelles qu’il
enferme de grandeurs ; & faict qu’au lieu d’en attendre des
graces, nous n’en deuons esperer que de rudes chastimens.
Ingrati spes tanquam Hybernalis glacies tabescet, & disperiet
tanquam aqua superuacua, dit le Sage. L’esperance que l’ingrat
à conceu en son cœur de quelque nouuelle faueur sera
reduitte au neant par son ingratitude, ny plus ny moins que
la glace qui se fond aux rayons du Soleil, & comme elle
n’est point arrestée, elle s’escoulera comme l’eau qui tombe
seulement à fleur de terre, sans penetrer plus auant, ny
sans luy causer le bon-heur de la fertilité : Il en arriue de
mesme aux Chrestiens ingrats qui communient indignement,
leur mauuaise conscier ce qui les condamne, leur
fait perdre l’esperance des bienfaits que cét Auguste Sacrement
communique aux ames innocentes, & bien qu’il
soit la source sacrée des eaux celestes, & des diuines rosées
capables de les arrouser, & de les rendre fertiles en bonnes



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