Anonyme [1649], RESPONSE D’ARISTE A CLYTOPHON SVR LA PACIFICATION DES TROVBLES DE PROVENCE. , françaisRéférence RIM : M0_3390. Cote locale : C_3_84.
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Quant au premier, ie demeure d’accord auec vous qu’on pouvoit
plus aduantageusement mesnager les interests de l’authorité
Royale ; vn crime si public & si scandaleux meritoit sans doute vne
penitence publique, pour reparer le scandale qu’vne si manifeste
rebellion auoit causé dedans & dehors le Royaume, vne
punition éclatante sembloit estre fort necessaire, l’impunité est
contagieuse en tout temps, mais particulierement dans la minorité
de nos Rois, qui ne fauorise desja que trop le libertinage des
Peuples ; le ioug de l’obeïssance est si pesant & odieux qu’on ne
manque iamais de le secouër quand on le peut faire impunément.
Les malheurs sous lesquels la France gemit depuis vne année,
n’ont point d’autre source que la creance qui s’est glissée dans
les esprits que le Conseil n’a pas assez de vigueur pour bien faire
obseruer ses ordres, ausquels on se sousmettoit seulement à discretion
& par courtoisie, iusqu’à temps qu’on ait fait quelque
grand exemple.

Il falloit donc prendre l’occasion qui se presentoit : La Ville
d’Aix estoit reduite à la derniere extremité, il n’y auoit plus
d’argent pour la solde des estrangers, leurs trouppes se débandoient
journellement faute de paye, & attirez encore par l’esperance
de faire fortune dans l’armée qui les assiegeoit, les païsans
& les Artisans n’estoient pas bien d’accord de souffrir plus long-temps
du Parlement ; il n’y auoit plus de respect pour leurs
personnes, ny d’obeïssance pour leurs commandemens que
par contrainte : & vous sçauez que ce qui est violent n’est
pas de durée. Vous n’ignorez pas que les Vignes & les Oliuiers
sont les principales richesses de nostre Terroir. Il y auoit plus
de deux mille goujats dans l’armée de Monsieur le Comte d’Alais
qui ne desiroient que la permission d’arracher les vnes & couper
les autres ; ainsi nos vendanges se trouuoient faites pour plusieurs
années. La crainte d’vne perte si considerable les mettoit
dãs le desespoir toutes & quantes fois qu’ils venoient à faire reflection
que ce malheur n’estoit suspendu que par la bonté d’vn
Prince qui passoit pour tyran dans tous leurs discours : Iugez
par là s’ils pouuoient estre de bonne humeur auec ceux qui les
auoient portez sur le bord d’vn precipice si affreux.

D’ailleurs, Monsieur le Comte d’Alais auoit vne armée de
cinq à six mille hommes aussi bien faits qu’il estoit possible de



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