Anonyme [1649], RELATION VERITABLE DE CE QVI S’EST FAIT ET passé dans la ville d’Aix en Prouence, depuis l’enleuement du Roy Louys XIV. fait à Paris, le sixiesme Ianuier 1649. Et en l’affaire du Parlement, où le Comte d’Alais, Madame sa femme, & Mademoiselle sa fille, le Duc de Richelieu, Monsieur de Sceue, Intendant, & plus de cent cinquante Gentils-hommes ont esté arrestez prisonniers. Apportée par le Sr T. enuoyé par Messieurs du Parlement de Prouence. , françaisRéférence RIM : M0_3202. Cote locale : A_8_75.
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toutes les années à certains temps par le suffrage d’vn Conseil
qu’ils establissent dans les villes, le Comte d’Alais depuis quelques
années voulant auoir ces Consuls à sa deuotion, auoit voulu changer
cét ordre, & obtenoit des lettres patentes de la Cour, lesquelles il remplissoit
du nom de ceux qui estoient de sa faction, & ainsi il ostoit le peu
de liberté qui restoit aux peuples de créer ceux qui les doiuent conduire,
& pour lesquels ils ont de la veneration, par ceste seule raison qu’ils sont
fais de leurs mains.

 

Mais comme le mal ordinairement reialit sur son Auteur, il s’est rencontré
que les Consuls d’Aix, que le Comte auoit fais par cette infame
inuention, ayant l’auersion de tout le monde au lieu de l’assister dans le
besoin, & lors qu’il vouloit opprimer les gens de bien de la ville auec
Messieurs du vieux corps du Parlement, le peuple s’est armé contre eux
& il a fallu se seruir de l’artifice que vous entendrés, dans la suite de ce
discours pour leur sauuer la vie.

Aprés l’enleuement du Roy, le Comte d’Alais fut auerty par
diuers Courriers de la part du Cardinal Mazarin, & de Monsieur le
Prince qu’il estoit temps d’executer ce qu’il auoit promis, depuis quelque
temps, à sçauoir de se faire Maistre absolu de la Prouince, & particulierement
de la ville d’Aix, & pour cet effet qu’il falloit exterminer tout
ce vieux corps auec les personnes de Condition qui les appuyoient ; sans
considerer que ce dessein embrassoit toute la Prouince, laquelle s’interessoit
dans le bien & le mal de ces Messieurs.

Sur ces auis, le Comte ne s’endort pas ayant recognu que beaucoup
d’amis de ces Messieurs estoient dans Aix, pour les secourir si on les vouloit
mal-traiter, il fit faire vne criée par laquelle il ordonna à toutes
sortes de personnes qui seroient dans Aix sans affaires, de sortir la ville à
peine d’estre mis en prison, & par ce moyen le dixiesme de Ianuier il oste
à ces gens là tous les moyens d’estre assistés : à mesme temps il appelle
toutes les troupes qui estoient dans la Prouince, tant de Cauallerie qu’Infanterie,
les fait entrer dãs la ville, conuoque tous ses amis, & les Gouuerneurs
des places : prie le Duc de Richelieu General des Galleres de
venir à luy auec les officiers des galleres : Comme il se voit en cest estat,
il ne fait plus difficulté de se declarer le 14. du mois, il fait prisonnier,
sans aucun suiet, vn Gentil-homme nommé la Tour, amy de Monsieur
de Beau-Reueil, Aduocat General du Parlement ; l’ont se plaind de cette
violence à Monsieur l’Archeuesque d’Arles, lequel estoit dans cette vil,
le depuis lõg-temps, pour empescher les desordres qu’il voyoit pouuoir
arriuer, par la violence de ce Gouuerneur, l’esprit duquel estoit aigry &
entretenu dans sa mauuaise humeur par le conseil iniuste de Goffredy, &
par l’auersion que Madame la Gouuernante a tousiours euë pour tous les
pauures innocens, & le prie de la part de ces Messieurs, de ne les traiter



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