Anonyme [1649], RAISONNEMENT SVR LES AFFAIRES PRESENTES, & leur comparaison auec celles d’Angleterre. , françaisRéférence RIM : M0_2970. Cote locale : A_8_29.
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Germain, puisque la victoire mesme ne sçauroit accroistre leur condition,
ny leur fortune ; bien au contraire, leur liurant les Villes dont
ils sont desia les Maistres, elle leur peut rauir les cœurs, que la force ne
sçauroit conquerir. Ils deuroient donc se conseruer ce respect & cét
amour des sujets, par lesquels ils regnent plus absolument, que par la
force des armes, & destourner ce premier choc qui leur couste plus
que la perte d’vne importante bataille ; Car les armes entre les sujets &
le Souuerain ressemblent à la pudeur des filles, qui se rendent facilement
dissoluës, lors qu’elles ont vne fois prostitué leur honneur ; Et
le pis est, que la difficulté de se fier les vns aux autres, porte souuent
les affaires à des extremitez déplorables. Que les Princes de Sainct
Germain ne poussent pas donc, dans la necessité de se deffendre, vn
peuple si obeïssant à ses Roys, & si affectionné à leur Sang, vn peuple
qui ne s’est pas plaint d’vne oppression de trente ans, parce que son
Roy estoit en aage d’authoriser ses Ministres, qui l’empeschoit d’oüir
les gemissemẽts de ses sujets. Que Monseigneur le Prince ne trempe pas
sa main dans le sang François, qui luy a aidé à gagner de si signalées victoires ;
Qu’il ne ternisse pas par vne fausse valeur, la plus heroïque qui
fut iamais ; Qu’il tourne plustost les traits de sa fureur contre les Ennemis
de l’Estat, qui commencent desia à se rire & à profiter de nos diuisions ;
& enfin apres auoir donné vne santé si parfaite aux parties exterieures
de l’Estat, qu’il ait vn peu soin des parties nobles, & particulierement
du cœur, cette incomparable ville de Paris, le nerf de la
guerre, la gloire de la France, & le plus beau joyau de la Couronne de
nos Roys.

 



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