Anonyme [1649], QVESTION, SI LA VOIX DV PEVPLE EST LA VOIX DE DIEV ? , français, latinRéférence RIM : M0_2951. Cote locale : A_7_14.
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dit-il, n’allez pas crier contre eux, ie ne vous exauceray point. S’il est
donc vray, comme il me semble qu’il le paroist assez, que Dieu
n’approuue pas que les peuples éleuent leur voix contre leurs
Souuerains, quand mesme ils sont violens & cruels : à plus
forte raison n’approuue-t’il pas qu’ils prennent iamais les
armes contre eux.

 

Hoc erit ius
Regis : filios
vestrostollet,
&c. greges
quoque vestros
addecimabit,
& eritis serui,

& clamabitis
in die illa à acie
Regis vestri,
& nõ exaudiet
vos
Dominus.
I. Regum 8.
Rexenim erit
super nos, &
nos erimus
sicut omnes
gentes, & iudicabit
Rex
noster, &
egredietur
ante nos, &
bella geret
pro nobis.
I. Regum 8.
a Politicor. li.
3. cap. 14.
Mus. 6.

Faire la guerre, c’est vn priuilege de Souuerain, toutes les
loix l’establissent, & la coustume l’authorise ; c’est ce dont les
Iuifs mesme conuindrent quand ils demanderent vn Roy. Il
sera sur nous comme les Roys sont sur les autres peuples : Il fera la
guerre pour nous, & sera le General de nos armées. Et pour ioindre
à l’authorité de l’Escriture celle de la Philosophie, a Aristote
dit que la plus grande prerogatiue des Roys, c’est d’auoir l’authorité
souueraine & perpetuelle des armes : ce qu’il confirme
par l’exemple d’Agamemnon, à qui il remarque que l’on contredisoit
hardiment dans le Conseil, mais qu’on obeïssoit fort
respectueusement à la campagne. Et parlant de plusieurs sortes
de Monarchies ; il remarque aussi que la Monarchie de
Sparte, qui estoit la moins absoluë de toutes, & la plus temperée
par les loix, auoit toutefois l’authorité absoluë de la
guerre ; ce qu’Herodote ; qui estoit deuant luy, auoit desia remarqué,
quand il auoit dit, que les Rois de Sparte auoient vne
authorité si absoluë pour le fait de la guerre, qu’ils la pouuoient
faire contre qui il leur plaisoit, sans que le peuple ny
les Ephores s’y peussent opposer. S’il n’appartient donc qu’au
Souuerain de faire la guerre, & que le peuple n’en puisse pas
faire contre ses voisins sans son commandement expres ; il luy
appartient encor bien moins de la luy declarer à luy mesme. Il
ne sçauroit y auoir de cause legitime d’vne rebellion si enorme,
& la defense mesme de sa vie propre, qui est veritablement
de droict naturel contre qui que ce soit, n’est pas approuuée
de Dieu contre le Prince, non plus que contre le Magistrat.
Il y a des exemples manifestes de cette verité dans l’Histoire
des Iuifs, où l’on voit des milliers d’hommes égorgez, &
des Tribus entieres decimées, sans qu’ils osent leuer les armes
contre : Moyse, qui estoit leur Conducteur, non pas par la
crainte de succomber dans leur resistance, mais par le respect
qu’ils auoient pour les commãdemens du Chef que Dieu leur



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