Anonyme [1649], LETTRE DE MADAME LA PRINCESSE DOVAIRIERE DE CONDÉ ENVOYÉE AV PRINCE DE CONDÉ son Fils, sur les Armes qu’il a prise injustement contre la France. , françaisRéférence RIM : M0_1952. Cote locale : A_5_3.
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que ie cesseray de viure, Mais encore enuers ses Citoyens,
qui vous ont chery auec des tendresses si
fortes esperances d’vn fauorable support. Il se sont
pourtant bien trompez, & leur affection a esté mal recompensée :
Qu’ils éprouuent à leurs despens de rigoureuses
saillies de vostre incõstance, & qu’ils ont de iustes
suiets de vous nommer leur second Attile. Pour moy ie
vous auouë franchemẽt, que quand ie fais reflexion sur
vostre procedé, ie demeure toute surprise, & i’ay peine à
comprendre ou vous aspirez, quelle gloire, & quels
auantanges vous esperez rẽporter de vos victoires pretenduës ;
appellez vous vaincre que de porter le ser &
le feu iusques dans le sein de vos plus proches : auez vous
cette soible imaginatiõ que les pilleries & les violences
vous aquierẽt vne reputation immortelle, & que toutes
vos actions dereglées vous donnẽt vne parfaite loüange ?
Il est bien difficile de le croire, puis que toutes extremitez
sont indignes d’vn Prince, qui doit moderer ses
actions dans la pureté d’vne égale iustice, estant le veritable
point ou consiste l’honneur, & non pas dans vn
dereglemẽt de la vie & des mœurs. Si vous pensez seruir
vostre Prince en desolant son païs vous vous trompez :
La puissence d’vn Roy dépend de l’empire qu’il a sur la
volonté de ses suiets, & non sur les ruines des maisons
dont la terre est chargée, les maisons n’obeyssent pas,
mais les hommes, & la terre ne peut rapporter de bon
fruit, si elle n’est cultiuée par ses habitans. Ainsi donc au
lieu de supporter cette Couronne dont vous estes le premier


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