Anonyme [1649], LETTRE DE MADAME LA PRINCESSE DOVAIRIERE DE CONDÉ ENVOYÉE AV PRINCE DE CONDÉ son Fils, sur les Armes qu’il a prise injustement contre la France. , françaisRéférence RIM : M0_1952. Cote locale : C_3_17.
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& le plus ferme appuy, vous seruez à la destruire :
Que pourra dire le Roy dans sa maiorité ? sinon
vous reprocher le mauuais soin que vous auez eu de
luy conseruer ses Estats, ou plustost vous nommer le
destructeur de son Royaume : Cette qualité (mon
fils) n’a pas tant de charmes, & n’est point si glorieuse
que celle de conquerant, celle cy est couuerte de
palmes & couronnée de laurier, & l’autre est toute
enuironnée de disgraces. Vos deportemens me persuadent
que vostre esprit sans doute est obsedé de
quelque mauuais genie qui vous inspire plustost le
chemin de vostre perte que de vostre salut, & me
font croire que vous ne pensez pas estre homme,
que vous deuez respondre deuant Dieu, qui est beaucoup
plus puissant que les Monarques de la terre, &
que vous dependez immediatement de luy vous ne
considerez pas que cette fortune, que vous estimez
vostre, est dans la main toute puissante, & que de
Prince que vous estes il peut vous rendre le plus chetif
& le plus mal heureux de tout le monde, & abaisser
cette vanité qui vous flatte iusques au neant. N’esperez
pas si vous continuez dans vostre humeur altiere
que la fortune vous soit tousiours fauorable : Ce
Dieu vengeur de tant d’ouurages & du sang que vous
respandez tous les iours auec impunité vous fera
tomber de vos felicitez imaginaires dans vn labyrinthe,
qui traisnera apres luy vne suitte de malheurs ou
vous verrez insensiblement enueloppé : alors vous
voudrez vous excuser, mais il sera trop tard, la diuine


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