Anonyme [1652], EXTRAICT DES REGISTRES DV PARLEMENT, CONTENANT Ce qui s’est passé pour l’esloignement du Cardinal Mazarin. , françaisRéférence RIM : M0_1351. Cote locale : B_11_29.
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moyen pour rendre les guerres eternelles & les reuoltes desesperées ?

 

Nous pouuons donc, sans perdre le respect qui est deu à nos Roys,
& sans violer l’obeyssance que nous auons jurée, prendre toutes sortes
de voyes legitimes, qui les pourront obliger à éloigner ces esprits
pernicieux, qui mesurent la durée des Empires à celle de leur credit ;
estant chose certaine, que sans la bonne foy il n’est pas seulement
impossible de regner sur les hommes, mais de viure parmy les hommes :
d’où vient qu’vn Sage disoit auec beaucoup de raison ; Que celuy
qui a renoncé à la bonne foy, n’a rien plus à perdre, estant asseuré
qu’ayant rompu le nœud de la societé, ou vie ciuile, il est de pire condition
que n’est celuy qui est priué de la naturelle.

Voila, SIRE, ce que le Cardinal Mazarin a souuent voulu faire
par méchans conseils, & paroles scandaleuses. Mais nous pouuons
asseurer que sa perfidie n’a iamais paru auec tant d’imprudence,
que lors qu’il vous a fait écrire que vostre intention estoit
de maintenir vos Declarations, & s’approchoit à mesme temps en
vertu d’autres Lettres exigées de vostre Majesté. En quoy nous pouuons
dire qu’il a tellement surpris sa bonté, que nous oserions asseurer,
que celuy qui tantost par sa colere, & tantost par sa peur, a
souuent blessé vostre authorité, ne luy a jamais fait vne playe si
mortelle ; il a creu qu’il la gueriroit, lors qu’il a fait publier par les
siens, ou inseré dans vne Declaration qu’il a dressée luy-mesme, &
tient encore cachée, que vostre Majesté auroit esté forcée d’accorder
celle qui le traite comme autheur de la continuation de la guerre,
des pirateries, & de tous les desordres de vostre Royaume. Mais
il ne peut alleguer cette pretenduë violence faite par des Sujets à
leur Souuerain, sans des-honnorer vostre Conseil, & accuser le peu
de soin, que la Reine vostre Mere auoit pris pour maintenir vostre
authorité.

SIRE, vos Declarations ont esté données aux instances de Monsieur
le Duc d’Orleans, & à nos tres-humbles supplications : Nous
pouuons protester que nous les auons obtenuës en la mesme façon
que l’on fait les graces de Dieu, qui par prieres & larmes se laisse
vaincre à ses creatures pour accorder leurs demandes.

Si l’ignorance du Cardinal Mazarin ne luy a pû permettre de faire
reflexion sur la justice de cette pensée, ou si sa malice a esté assez
grande pour la mépriser, que pouuons-nous attendre de bon pour
vostre Majesté & le repos public, de celuy qui a voulu prendre vne
qualité inouye en France de Sur-Intendant de l’éducation de vostre
Majesté ?

N’auons nous pas sujet de craindre, lors que nous voyons que cét



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