Anonyme [1652], LE VERITABLE MANIFESTE DE MONSEIGNEVR LE PRINCE Touchant les raisons & motifs de sa sortie, & les protestations qu’il fait aux Parisiens qu’il n’abandonnera iamais leurs interests. , français, latinRéférence RIM : M0_3942. Cote locale : B_6_9.
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remporté que des attentes indceises, & des promesses qui n’auoiẽt rien
de plus asseuré que leur dissimulation :

 

Apres ce qui en a paru dans Ville neuf–Sainct George, ie pense qu’il n’en
faut plus douter, & ceux qui seront tant soit peu instruits des souplesses de la
Cour dans cette conioncture, ne donteront nullement de l’auersion qu’elle
a pour la Paix, à moins qu’ils ne prennent plaisir de se laisser tromper par des
apparences, pendant qu’elles sont visiblement dementies parles effets. Vous
sçaués Messieurs de Paris quel estoit l’engagement de l’Armee ennemie
conduite par le Mareschal de Turenne, dans ce poste : Vous sçauez la
difficulté ou plustost l’impossibilité de sa retraite. Vous sçauez ou qu’il falloit
perir par la faim, ou qu’il falloit en decamper pour le moins auec la perte
du bagage, & le carnage de toute l’arriere garde : Vous sçauez par consequent
que cette Armee estant defaite, la Cour estoit visiblement reduite à n’en
pouuoir plus, & qu’il falloit necessairement se resoudre ou à perir par la
Guerre, ou à trouuer quelque resource à ce malheur par la negotiation
d’vne Paix.

La Cour ne manqua pas d’auoir recours à ses fourbes accoussumées ; les
apparences de cét accomodement tant desiré parurent beaucoup plus specieuses
qu’elles n’auoient iamais esté auparauant, parce que le danger de
l’Armée ne sembloit plus auoir aucune resource : les propositions de la Paix
estoient reçeuës auec beaucoup plus de disposition de ceux qui les auoient
auparauant rebutées. & comme ie voyois que la Cour ne se rendoit complaisante
à cette necessité publique que parce que son Armée n’estoit point
en estat de m’échaper des mains, ie prenois plaisir de redoubler mes
veilles pour l’obliger à cét accomodement par le desespoir de toute sorte
de resource :

I’aduouë que dans cette conioncture l’accomodement ne me paroissoit
point difficile, parce que la Cour n’auoit plus de force pour s’y opposer :
Les affaires estoient sur le point d’estre terminées par vn dernier traité,
tout estoit disposé à vne parfaite reconciliation, lors qu’vne maladie qui
m’alita, à contre temps pour le repos public, fit voir que ces belles aparences
de la Cour pour la Paix n’estoieut que les phantosmes ordinaires de
sa Politique, iustifiant par le refroidissement qui s’ensuiuit, la creance
qu’on auoit conceuë, que la Paix n’entroit iamais dans ses desseins, à
moins que la necessité l’y fit trouuer vne place par la faueur de mes bons
succez.

Les belles responses qui furent faites au Clergé, aux Deputez de la Ville,
& en suite à ceux des six Corps : le beau iour que la Cour faisoit entreuoir
pour la Paix à S. A. R. pendant cette mauuaise conjoncture du siege de l’armee
ennemie dans Villeneufue S. George, sembloient pour le moins aparẽment
oster toute la defiance qu’on auoit eu du procedé de sa conduite passee ;
lors que le de campement de l’armée du Mareschal de Turenne ayant esté fauorisée
par ma maladie & par l’absence des autres Generaux que la necessité
d’estouffer vne sedition naissante, pratiquee par les artifices de la Cour, auoir



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