Anonyme [1650], ADVIS SVR LE GOVVERNEMENT DE L’ESTAT. , françaisRéférence RIM : M2_36. Cote locale : D_1_20.
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C’est pourquoy dans tous les Republiques bien policees les Estrangers
n’ont point esté admis.

 

Vous ne sçauriez douter de celle des Hebreux, puis que vous
auez desia veu l’auersion qu’ils y’auoient, & le conseil de leur Sage
sur cela : & s’il vous reste encore quelque scrupule, escoutez la defence
qui en fut faite au peuple lors que Dieu luy promit vn Roy,
Tu ne pourras, dit le Seigneur, élire vn Roy d’vne nation Estrangere,
mais tu le choisiras parmy tes freres.

Les Peres ont tousiours eu de l’auersion pour eux ; les Atheniens
n’ont pas mesme voulu leur donner l’entree de leur ville : Et à cette
loy de Solon, Pericles adiousta, que ceux-là seulement fussent faits
Citoyens d’Athenes, qui soient nez de pere & de mere Atheniens ;
de sorte qu’Euagoras eut de la peine apres beaucoup de bien faits &
de seruices rendus à la Republique, d’y estre admis au rang des Citoyens :
apres quoy il encherit sur les autres, & fit vne loy, par laquelle
les bastards estoient priuez des droits de la Bourgeoisie, quoy
que le premier il l’ait violee en faueur d’vn bastard qu’il laissa pour
son successeur. Voyez iusques où alloit la delicatesse des Anciens
quand il falloit estre estimé Citoyen de leur Republique.

Les Lacedemoniens & les Thebains par l’ordre de Lycurgue donnerent
l’exclusion de leurs Republiques aux Estrangers : Les Spartes
obseruerent si exactement cette loy, qu’ils furent appellez DIRINOXENES,
c’est à dire, comme vous sçauez, inhospitaliers :
& si quelque Citoyen sortant de Sparte seiournoit chez les Estrangers,
il estoit puny de mort : parce qu’il s’estoit exposé à emprunter
leurs vies, & à les rapporter parmy ses Concitoyens.

Les Egyptiens ne vouloient point auoit de commerce auec eux,
& les Romains, enfin, les considererent tousiours comme indignes
de porter les marques de leurs Citoyens : C’est pour cela que l’vne
de leurs anciennes Loix leur deffendoit de monter sur la muraille de
la ville : c’est pour cela que Marcellus Consul ne pût souffrit qu’vn
Estranger à qui Iules Cesar auoit donné le droict de Bourgeoisie,
fut esleué à la charge de Decurion, & qu’il le fit prendre & foüetter
dans la place publique, afin de luy oster l’impression qu’il auoit eue,
qu’on le deust traitter comme citoyen Romain ; & c’est pour cette
mesme raison que Claudius Cesar deffendit aux Estrangers, sur
peine de mort, de prendre des noms de Famile Romaine de crainte



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