Sipois, Cermier de (P. A. N.) [signé] [1649], LETTRE DV SIEVR CERMIER DE SIPOIS, A MONSEIGNEVR LE DVC D’ORLEANS. SVR LES DEFFIANCES DE de quelques particuliers touchant la Paix. , français, latinRéférence RIM : M0_2198. Cote locale : C_3_49.
page précédent(e)

page suivant(e)

-- 18 --

Voila, Monseigneur, ce qui est arriué à ce Comte
de Flandres pour auoir voulu punir ses suiets auec trop
de rigueur ; voila comme se sont comportez les Gantois :
quoy que gens nourris dans le commerce ; voila
enfin comme les affaires sont venuës à vne extremité,
faute d’auoir preferé la misericorde à la seuerité. Ce qui
doit bien enseigner aux Princes de ne se pas aisément
engager dans ses sortes de guerres ciuiles, & que s’y
estans engagez par quelque necessité pressante, ils doiuent
chercher tous les moyens possibles pour s’en dégager,
& donner ou accepter toutes les honnestes conditions
qui se peuuent presenter pour en sortir. Car
comme nous venons de voir, quelques-fois les Princes
qui refusent des conditions honnestes & raisonnables,
pour l’esperance qu’ils ont en leurs grandes forces, s’en
trouuent mal puis apres ; Et souuent on a veu de bien
petites troupes faire teste aux plus puissantes armées des
plus grands Princes. Du temps de la bataille de Poitiers,
où le Roy Iean fut pris, le Prince de Galles, auant que
combatre, luy fit offre de rendre tout ce qu’il auoit conquis
luy & ses gens, depuis son depart de Bourdeaux,
& de rendre aussi tout le pillage : mais le Roy ne voulut
pas accepter cet offre, mais vouloit que le Prince & quatre
des plus grands Seigneurs de son armée se rendissent
à luy à sa volonté. Le Prince qui estoit genereux, aima
mieux combattre que d’accepter cet accord honteux &
des honorable pour luy ; & combatit en effet si vaillammẽt,
que ses Anglois, quoy qu’en fort petit nombre, defirent
les grandes forces du Roy, & fut le Roy pris prisonnier
& plusieurs autres grands Princes & Seigneurs : pour
lesquels racheter, le Royaume fut si épuisé de finance,
qu’il falut faire apres cela de la monnoye de cuir, qui
n’auoit qu’vn petit clou d’argent au milieu. Et de cette
bataille arriuerent en France infinies miseres, qui ne fussent
pas arriuez si le Roy eut esté si bien aduisé que de
vouloir sortir de guerre par doux & asseurez moyens,



page précédent(e)

page suivant(e)