Saint-Julien,? [?] [1650], LE COVRRIER BVRLESQVE DE LA GVERRE DE PARIS, Enuoyé à Monseigneur le Prince de Condé, pour diuertir son Altesse durant sa prison. Ensemble tout ce qui se passa iusques au retour de Leurs Maiestez. , françaisRéférence RIM : M0_814. Cote locale : D_1_14.
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Des picoreurs de Saint Denis,
Virent prés les bois de Bondis
Vne forte troupe & tres grande
De caualerie Alemande,
Demander si nos Generaux
Furent aussi-tost à leur dos,
C’est peché mortel que ce doute,
L’Allemand fut mis en déroute,
Apres s’estre bien defendu :
Iusques là mesmes qu’vn pendu
Le capitaine de la troupe,
(Quand i’y songe ma voix s’étoupe)
Vint tirer à brusle pourpoint
Nostre Duc qui ne branla point ;
Mais d’vn reuers de cimeterre
Renuer a ce Reistre par terre :
Les vns disent de pistolet :
Enfin le coup ne fut pas laid,
Le drosse en est au cimetiere,
Et mord fierement la poussiere.

 

 


Le sept. Par vous braue Condé,
Le Duc d’Orleans secondé,
Ayant tiré des voisinages,
Des villes, bourgs, chasteaux, villages,
Autant de Troupes qu’il en put,
Sans que Paris debloqué fut,
Il fit bien de caualerie
Trois mille, & cinq d’infanterie,
Qui filerent toute la nuit
Vers Charenton à petit bruit.

 

[3 lignes ill.]

 


Lundy huit. L’Aurore éueillee
Vous trouua dans vne vallee,
Que nous appellons tous Fescamp,
Où le voleur est tres-frequent
Durant tous les mois de l’annee :
Mais où deuant cette iournee
Iamais tant il ne s’en compta
Que dans ce iour elle emporta.
Là vostre Gros prit sa seance,
Et se saisit de l’eminence
Tandis que quelque Regiment
Détaché par commandement,
Alla pour donner l’escalade
A la malheureuse bourgade,
Auant qu’aucun fut assommé
Clanleu par vos gens fut sommé
De leur remettre cette place,
Qui ne leur fit pas cette grace ;
Et sur l’heure les assiegeans
De cette brauade enrageans
Occuperent les auenües
Que nos canons rendirent nües.
Sans mentir le coup le premier
Les fist plus nettes qu vn denier ;
Le second rompit quatre cuisses,
Le troisiéme tua deux Suisses.
Nauarre braue Regiment
Lâcha le pied vilainement :
Vingt de ses Officiers à terre
Maudirent mille fois la guerre
Qui les enuoyoit chez Pluton
Deuant vn chetif Charenton.
Vostre Altesse ayant sceu l’escarre
Qui s’estoit faite de Nauarre,
Pensa creuer dans son pourpoint.
Pourtant elle ne creua point,
Sur l’esperance de combattre
Le badaut qu’on tenoit à quatre,
Qui comme vn Diable iuroit Dieu
Qu’il vouloit secourir ce lieu.
Il disoit d elle peste & rage
Cependant qu’auec aduantage
Elle attendoit ceux de Paris
Comme le chat fait la souris :
Se fiant sur son eminence
Elle auoit grande impatience
De taster le poux au Bourgeois
Qui ne sortit point cette fois.
Il est prudent & craint la touche,
Ioint qu’il n’aime point la cartouche,
Et qu’elle en auoit fait charger :
Paris n’en vouloit point ronger,
Et certes auecque prudence.
(Puis qu’on dit que cette eminence
Se pouuoit aussi peu forcer
Que l’autre se pouuoit chasser.)
Vostre Altesse faisant fanfare,
Commit pour soustenir Nauarre
Chastillon auec du renfort,
Ou plûtost pour chercher la more :
Car helas ! au bas de son ventre
Vne balle de mousquet entre,
Sans respecter ce Duc nouueau,
Ieune, vaillant, adroit & beau.
Tost apres vos troupes filerent
Pat des jardins qu’elles forcerent,

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