Du Tillet [signé] [1652], TRES-HVMBLES REMONSTRANCES PAR ESCRIT FAITES ET PRESENTEES AV ROY PAR MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS EN LA VILLE DE SVLLY SVR LOIRE, CONTRE LE RETOVR ET POVR l’esloignement ou la punition du Cardinal Mazarin. , françaisRéférence RIM : M0_3841. Cote locale : B_13_31.
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Souueraine, & mesme des tesmoignages d’auersion contre la
personne du Prince ; c’est la pratique commune à tous les Fauoris
de faire croire aux Roys qu’on offense la personne de leurs Majestez
lors que l’on attaque leurs Ministeres ; les artifices du Cardinal Mazarin,
& la connoissance que nous auons du passé, nous font croire
qu’il n’en vsera pas mieux, & ainsi qu’il rendra de mauuais offices
à Monsieur le Duc d’Orleans, aux Princes du Sang, aux Cours
Souueraines, à vostre bonne Ville de Paris, à vos principaux domestiques,
à la Noblesse, à vos Officiers, & à tous vos peuples ; ce
qui nourrira Vostre Majesté dans vne continuelle defiance de ses
plus proches & de ses plus fidels seruiteurs, d’où viendront les ressentimens
des offenses, & les apprehensions qui altereront le repos
& la Paix de vostre Estat. Ces malheurs sont inéuitables, SIRE, si
Vostre Majesté ne renuoye celuy qui ne peut estre dans le Pays &
terres de vostre obeyssance, sans y porter le trouble par son humeur
entreprenante, qui s’efforcera tousiours de faire croire à Vostre Maiesté
que les plaintes contre l’insolence de sa fortune, sont des conspirations
contre vostre Estat.

 

Lors qu’il plaira à Vostre Maiesté se faire instruire de tout ce qui
s’est passé durant vostre Minorité, elle trouuera que ce n’est pas le
Cardinal Mazarin qui a fait des merueilles pour vous, mais que Dieu
a fait des miracles pour vous garantir des perils, dans lesquels cét
homme peu sage auroit ietté vostre personne, vostre authorité, &
tout vostre Royaume.

Il ne suffit pas que les Roys s’arrestent dans la consideration des
choses qui les touchent en particulier, estant enuoyez de Dieu pour
estre les Gouuerneurs & les Peres des Peuples qui leur sont commis ;
mais ils sont obligez d’esloigner tout ce qui peut corrompre les
mœurs de leurs Sujets, principalement de ceux qui ont l’honneur de
les approcher.

Ceux qui ont voulu dire que le Cardinal Mazarin n’auoit point
l’esprit porté à la cruauté, n’ont iamais consideré ny ce qu’il a fait
pour entretenir les guerres, & empescher la Paix, ny la resolution
qu’il prit sans sujet de faire perir par la faim dans vostre bonne Ville
de Paris deux millions de personnes, ayant contraint la Capitale de
vostre Royaume à prendre les Armes pour sa deffense naturelle, &
pour chercher du pain ; ce qui donna à vos voisins vne tres-mauuaise
impression du Gouuernement de vostre Minorité, toute l’Europe
ayant sceu que ce siege auoit esté entrepris par l’indignation
d’vn Estranger, qui vouloit faire finir par le plus cruel de tous les



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