Davenne, François [?] [1650], LETTRE PARTICVLIERE DE CACHET envoyée par la REYNE REGENTE A MESSIEVRS DV PARLEMENT. Ensemble vne response à plusieurs choses, couchées en la Lettre envoyée au Mareschal de Turennes, & aux avis donnez aux Flamans. , françaisRéférence RIM : M0_2250. Cote locale : C_3_9.
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semblent auoir la vertu qu’ils n’ont point, afin de moissonner où
ils n’ont pas semé.

 

Sois magnanime peuple François, & vne bonne guerre contre se
Cardinal, t’amenera vn bon repos : sçache que Mazarin & la paix
ne peuvent compatir ensemblement, non plus que l’eau & le
feu. C’est pourquoy il te faut resoudre à faire de deux choses l’vne :
ou d’estre tousiours tyrannisé, tandis qu’il subsistera dans
l’Estat ; ou de l’en chasser, afin que toutes les playes qu’il t’a faites
en tant d’années soient gueries en vn moment.

Que m’objecterez-vous encor, pour n’avoir pas sujet de resister
à Mazarin ? que Monseigneur le Duc d’Orleans resté, afin de
s’opposer à ce desolateur de la Monarchie, quand mesmes il
seroit paruenu jusqu’au bout de tous ses desseins ? & le bon Prince,
il porte trop l’interest de ce Ministre qui l’a pipe. Ce Serpent
connoist assez la facilité de son esprit, auquel il fait prendre comme
de la cire mole, toute sorte d’impressions. Il voit qu’vne
pomme le peut amuser. Il l’en amorse iusqu’au temps qu’il le
recompensera, s’il subsiste, comme il a fait les Princes prisonniers.

La derniere Lettre que le Cardinal vous envoye, au nom du
Roy, sur son départ vers la Guyenne, fait bien voir qu’il l’amuse,
auec les ordres qu’il luy laisse, comme si sa Majesté, ainsi qu’vn
autre Sainct Louis, s’en alloit faire le voyage d’outre mer. Il luy
donne plus de beurre que du pain ; & pour le mieux coucher en
jouë, il luy fait des comptes à faire dormir de bout. Et son Altesse
au contraire qui fait la resoluë, se voyant flattée sous pretexte
de cette puissance, ne se soucie guere que trois Princes soient à
la mercy de ce Lyon, qui leur tient le poignard dans le sein, ny
du Roy & du Due d’Anjou, que ce Monstre a conduit sur vn
port de mer, lesquels il peut en moins de six heures livrer à l’Espagne
pour s’y reconcilier. L’intelligence que ce Ministre a auec
son Altesse & Beaufort, leur fait diuersement esperer à chacun,
ce qu’on en verra esclorre quelque iour à leur avantage, si leurs
desseins reüssissent, ou à leur desarroy, si Dieu les deçoit.

Son Altesse pour vous fausser sa parolle la quatriesme,
ou pour mieux dire la centiesme fois, vous auoit promis que
dans dix iours l’affaire de Bourdeaux seroit accommodé, & au
moment qu’elle vous faisoit ces belles promesses, elle envoye



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