Davenne, François [?] [1650], LETTRE PARTICVLIERE DE CACHET envoyée par la REYNE REGENTE A MESSIEVRS DV PARLEMENT. Ensemble vne response à plusieurs choses, couchées en la Lettre envoyée au Mareschal de Turennes, & aux avis donnez aux Flamans. , françaisRéférence RIM : M0_2250. Cote locale : C_3_9.
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intelligentes, à cause qu’il n’a point d’esprit. Vn peu de bien present,
duquel les tyrans repaissent les peuples, leur fait donc oublier
les maux qu’il leur ont fait par le passé, ausquels ils ne songent
plus, & toutes les felicitez advenir qu’vn iuste leur fasse
esperer de sa personne, ne sont pas bastantes de l’obliger à soustenir
vn moment d’vne bonne guerre, afin d’avoir vn bon repos.
La nature lache fait plus d’estat d’vne fauce paix, par le moyen
de laquelle on l’enveloppe dans vn trouble perpetuel, que d’vne
genereuse bataille qui la feliciteroit.

 

Asseurez-vous doresnavant que les Gouverneurs des places
n’auront pas la hardiesse de se bander contre leur Roy ? ils n’ont
qu’vne trop souple obeyssance, quand ils voyent vn Monarque
dans sa splendeur, devant lequel ils se considerent comme des
petits vermisseaux ; & ils ne possedent que trop de hardiesse,
quand on a levé le masque d’vne guerre civille, dans la disioncture
de laquelle, voyans dechirer les maisons Royalles, ils se cantonnent
comme des geans.

Estes-vous certains que Mazarin sera plus favorable aux Princes
& au Roy, que ie ne donne à soubçonner, les vns desquels il
tient desia captifs, afin de ne les avoir pas pour obstacles, tandis
qu’il traine les autres apres le char de ses triomphantes convoitises,
afin de s’en servir ainsi que d’vne coupe d’or, iusques à ce
qu’il fera éclorre devant tout le monde, ce qu’il cache dans son
cœur ? fiez-vous à vn artificiel lyon, déchire par mille iustes libelles,
lequel se hasardera de tout perdre, pour se precipiter en
se desesperant. S’il fait publier dans la lettre écritte au Mareschal
de Turenne, que les coustumes de France ne sont point en
cela, comme celles de la Turquie, ny de l’Espagne, où on étoufe
les plus proches pour divers respects ; n’est-il pas pire qu’vn
Turc dans l’ame, & naturel Espàgnol de corps, afin d’executer
en vne terre estrange, ce qu’on pratique dans son pays ? sans doute
le train qu’il prend, & le dessein qu’il a de le faire, luy fait dire
qu’il ne le fera pas. Il imite le larron, lequel pour coupper vne
bourse à la famelette, crie au voleur, afin de luy distraire la veuë
de dessus luy, en luy en montrant vn autre, tandis qu’il fait son
coup. Puisque Richelieu son devancier l’à executé, quoy qu’il
fust d’ailleurs François, afin qu’en faisant trancher des testes, nulle
grandeur ne luy resistat : Mazarin nous veut-il faire accroire,



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