Bourdelois, J.-M. [1652], LE TOMBEAV FVNEBRE DE MONSEIGNEVR LE DVC DE VALOIS. Presenté à toute la France. Par I. M. Bourdelois. , français, latinRéférence RIM : M5_334. Cote locale : B_5_47.
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parle pas de mon déplaisir seulement, ie parle de la douleur
de toute la France, qui s’interesse auec des sentimens si pitoyables
qu’on peut dire auec quelque apparence, que ses regrets
auoisinent en quelque façon la grandeur de sa perte.
Elle diminue beaucoup des glorieuses esperances qu’elle
auoit conceues : elle se flattoit agreablement parmy les douceurs
qu’elle attendoit de ce ieune Prince, qui dans ses plus
innocentes années faisoit reluire l’éclatante Vertu de ses Peres,
mais elle n’a pas iouy vn moment de ses rauissemens : car
presque aussi-tost qu’elle a veu naistre cét Astre rayonnant de
lumiere, au mesme moment elle le voit éclipser dans vn temps
qui luy donne de la crainte, puis que iamais les Astres dans
leur orient ne souffrent eclypse que toute la nature ne patisse.
Nous anions chanté des Cantiques de ioye à sa naissance,
mais à present ils sont changez mal heureusement en Cantiques
funebres. Nous auions veu la naissance de cette con[5 lettres ill.]ation
bien heureuse auec mille marques d’allegresse, &
lors qu’elle se retire de nos yeux, nous ne voyons cette funeste
[1 mot ill.] qu’auec mille marques de douleur, nous l’auions
faire par des acclamations de ioye en naissant, nous l’accempagnons
[1 mot ill.] par nos gemissemens en mourant. Que de diuers
mouuemens presque dans le mesme instant, à peine
auions nous celebré sa naissance, que nous sommes contrains
de celebrer sa mort. A peine luy auions nous erigé des trophées
de gloire, qu’il luy faut eriger vn funeste tombeau. Et
enfin nous n’auions pas encore mis la derniere main au Panegyrique
de sa naissance, que par vn stile tout contraire nous
deuons en pleurant l’accompagner parmy les morts. Puissante
Nature, que vos secrets sont inconnus, & que vos routes
sont cachées aux soibles esprits des hommes, pour quoy nous
donner tout à la fois toutes vos graces, pour ne permettre
pas que nous en eussions la moindre iouissance ? Pour quoy
vous ioüer de la sorte de nostre foiblesse, nous priuant aussi-tost
d’vn bien duquel nous n’auions pas encore éprouué la
douceur ? Mais ie voy bien que vous estes inexorable, & que
vous n’escoutez pas seulement nos plaintes dans le moment


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