Anonyme [1652], L’OFFICIER DE CE TEMPS DE LA MAISON ROYALE, Voyageant par la France pendant le temps present ; qui apprend les miseres & desordres qui se sont commis & commettent dans les Prouinces, Seigneuries & Terres du Royaume, causes d’icelles ; Dont il auroit escrit vne Tres humble Remonstrance faite au Roy, luy declarant les moyens d’y pouruoir à la gloire de Dieu, & le repos de son Estat, sur les mauuais conseils à luy donnez par ses plus proches. , françaisRéférence RIM : M0_2585. Cote locale : B_3_25.
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ioüir auec mediocrité, & pour lesquelles vn Prince
ne se doit iamais endebter.

 

Voila (SIRE) la forme & l’ordre qu’il faut tenir
en vostre menage, telle que l’ont practiquée vos predecesseurs
moins riches de reuenu que vous, laquelle
est de beaucoup esloignée de la façon de faire d’aprent :
Car l’on vous fait faire tout au rebours.

Vous commencez par les dons & despenses inutiles,
qui sont immenses & infinies, auec vne telle
profusion & desbordement, que pour y fournir on
vous endebte & ypoteque estrangement. Pour le
regard des recompenses, elles marchent apres, mais
assez maigres, & souuent enuers ceux qui font les
moindres seruices, & le meritent le moins. Quant à
vos debtes, il n’y a rien de si mal ny plus à regret
payé : vous le sçauez tres-bien, & sur cela, iugez le
miserable Estat où vous estes.

Les anciens Rois de France n’essent iamais souffert,
que l’ordinaire de leur despence, & le payement de
leurs debtes, fut retardé ny mis en arriere, pour fournir
aux dons & voluptez : S’ils en auoient de reste,
ils ne failloient pas d’en faire leurs liberalitez, mais
ils donnoient mediocrement, & faisoient payer
promptement. Ainsi faisans, il est tres-certain que
cent escus qu’ils donnoient, leur profitoient plus &
obligoient d’auantage leurs sujets à recognoissance,
que ne font à present deux mil escus que vous pourriez
donner, pour les receuoir de vostre espargne,
ou iamais il n’y a d’argent pour les honnestes hommes
(comme chacun sçait) de façon que vos pauures
Officiers & sujets qui y sont assignez, de salaire, vacations,
recompenses, ou dons, employent souuent
vn an ou deux, à solliciter leur payement en vain :
De sorte que en fin ennuyez de chapperonner &
faire la court à Messieurs les Thresoriers, il faut qu’il
en donnent la moytié à telles sangsues, ou à leurs



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