Anonyme [1652], L’ESPRIT DV FEV ROY LOVIS LE IVSTE A LA REYNE. Luy tesmoignant ses sensibles regrets sur le mauuais gouuernement de l’Estat. , françaisRéférence RIM : M0_1286. Cote locale : B_4_19.
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fois. Ne faites point ce tort à la France, de croire
qu’elle n’ait rien qui vous puisse plaire à l’égal de
cét estranger : Mais faites produire à vostre prudence,
en vous separant de luy par raison d’Estat,
vn effet que la mort de l’vn ou de l’autre, vous
rend inéuitable. Croyez-vous en effet que si Mazarin
n’estoit coupable, ou s’il n’y auoit quelque
malediction attachée à sa personne, il fust haï de
toute la France comme il est ? Mesurez les forces
de vostre authorité Royale à cette haine, & voyez
si dans l’estat où vous estes, vous estes capable
d’en venir à bout. Que si vous jugez que cette haine
soit inuincible & vostre puissance foible en sa
comparaison, que ne luy cedez-vous de bonne
heure l’auantage qu’elle doit enfin remporter sur
vostre amour. Pensez à la mort de vos saints Maigrains
& de vos autres Illustres, & croyez que ce
sont des victimes que vous immolez à vostre passion,
qui n’en deuient pas plus satisfaite, & qui
doit enfin estre vaincuë, si vous ne voulez perir
auec tous les vostres. Cedez à la raison & à la necessité
cette puissante Maistresse, sous laquelle
tout flechit, & croyez que ce n’est point ceder
quand on n’est vaincu que par elle, & par soy-mesme
Cedez à la constellation ennemie, cedez
au temps, cedez à l’aage qui vous fait voir dans
vostre declin, & faites dans l’aduersité vne religieuse
retraitte, que tant de grands hommes ;
du nombre desquels fut Charles Quint, vn
de vos predecesseurs, ont trouué bon de faire


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