Anonyme [1652], L’ESPRIT DV FEV ROY LOVIS LE IVSTE A LA REYNE. Luy tesmoignant ses sensibles regrets sur le mauuais gouuernement de l’Estat. , françaisRéférence RIM : M0_1286. Cote locale : B_4_19.
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Vous portastes tous vos soins à satisfaire
tous vos desirs, & la digue de vostre foible retenuë
estant vne fois rompuë, par la violence de vos passions,
leur fureur, comme vn vent impetueux,
vous emporta dans vne mer de voluptez, où vous
ne pouuiez manquer de faire naufrage, puis que
vous n’auiez pour pilottes que trois aueugles,
Mazarin, vostre desir, & l’amour. Vous commençastes
à singler à pleines voiles sur cét occean, à la
faueur d’vn doux vent de terre, qui naissoit de la
bien-veillance de tous les peuples, non encore
alterée par aucune mauuaise impression qu’on eust
de vos mœurs, & comme le calme estoit grand pour
vous dessus ses flots applanis, & l’air le plus riant
du monde, vous creustes que cette mer seroit pour
vous tousiours sans escueils & sans orage, parce
que vous croyez auoir produit des Alcions capables
de la calmer. Vous vous figuriés en effet, qu’il
vous deuoit estre permis de passer le temps à rire,
apres auoir long-temps pleuré, que vostre
bandeau Royal & vostre crespe, couuriroient vos
desseins de galanteries, aussi bien que vostre front
& vostre visage : que la renommée n’oseroit vous
rendre suspecte d’aucune pratique amoureuse,
apres auoir publié vingt ans vostre retenuë & vostre
vertu par toute la terre. Sur cette confiance
vous pristes l’essor auec plus d’audace, Versailles &
Argenteüil, eurent l’honneur de vous preparer
la collation vne fois ou deux, vous beustes-là des
santez, où nous n’eusmes part le feu Cardinal ny


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