Anonyme [1652], LETTRE RENDVË AV ROY EN PARTICVLIER, Pour luy representer les dangers ausquels les Princes exposent leurs Estats en poussant à bout la patience de leurs Peuples. Prouué par les Exemples tirez des Histoires Anciennes & Modernes, Estrangeres & Domestiques. , français, latinRéférence RIM : M0_2254. Cote locale : B_2_34.
page précédent(e)

page suivant(e)

-- 5 --

conuentorumque constantia & veritas, sic dicta quia fiat quod
dictum est. La foy consiste à tenir ce dont on est conuenu :
Si on y contreuient il ny a plus de foy : & c’est de là que n’aist
assez souuent la ruine, non seulement des particuliers & des
familles, mais aussi des villes entieres, & des plus florissans
Empires. Philippes de Macedoine, ayant pour quelque legere
occasion, entrepris de faire la guerre contre les Ætoliens ;
mais enfin ayant esté obligé d’en venir à vn accord,
parce qu’ils auoient appellé les Romains à leur secours,
garda si exactement la parole qu’il auoit donnée à l’ennemy,
que pour l’obseruer mieux de poinct en poinct, il se faisoit
lire tous les iours deux fois les articles de cette paix :
sçachant bien que nulla res vehementius Rempub. continet
quam sides, & que c’est elle, comme a fort bien dit depuis
Quinte-Curse, qua stabilit & aternum facit Imperium.

 

Ce Philippes estant mort, & Perseus son fils luy ayant
succedé à la Couronne, Onesimus, Gentil-homme Macedonien,
qui auoit esté l’vn des plus fidelles conseillers de
Philippes, remonstra par plusieurs fois au Roy Perseus,
qu’il deuoit à l’imitation de son pere, tenir tousiours dans
ses mains, & lire le plus souuent qu’il pourroit ce traitté,
pour le faire obseruer inuiolablement : Perseus d’abord se
mocqua des remonstrances d’Onesimus : mais comme il vit
qui luy repetoit si souuent vne mesme leçon, il le disgracia
& l’eut pour suspect : si bien que se bon Gentilhomme fut
contraint, pour sa plus grande seureté, de se retirer à Rome.
Qu’arriua-t’il, enfin ? Perseus ayant fait vn grand amas
de deniers, & s’estimant assez fort pour soustenir les Romains,
rompit peu à peu les articles de la paix l’vn apres l’autre ;
si bien qu’il obligea les Romains d’enuoyer contre luy
Paulus Æmilius à la teste d’vne Armée, qui en moins d’vn
mois se saisit de toute la Macedoine, & prit Perseus prisonnier
auec son fils qui furent menez en triomphe à Rome,
où apres cela ils mouturent miserablement dans vne prison.

Voila, Sire, ce qu’il a profité à Philippes de garder sa foy,



page précédent(e)

page suivant(e)