Anonyme [[s. d.]], LE SECRET Necessaire de sçauoir. Enuoyé à MONSEIGNEVR LE PRINCE. , françaisRéférence RIM : M0_3633. Cote locale : B_6_44.
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desseins qu’il a de perdre tous les Peuples. Il faut
aduoüer qu’en cette occasion le silence seroit vn
crime, & qu’il faut que la langue, & que la plûme
agissent au deffaut du fer, en ceux qui par leur profession
sont obligez de mener vne vie tranquille &
sedentaire. On ne peut exciter trop d’animosité
dans les cœurs des Peuples, contre le plus perfide
de tous les hommes, qui par ses artifices & par ses
crimes à fait plus de maux en la France que les Gots
& les Wandales n’en ont fait dans les lieux où la
rage les a portez. Et cependant nostre destinée
est telle qu’il se treuue des Ames assez lasches qui
se rendent partisanes de ses volontez & de ses actions.
On luy a dedié des Liures, on a fait son
portrait sur la toille & sur le cuivre; quelques-vns
en font l’ornement de leurs Cabinets, on a
composé des Apologies en sa faueur; en fin on peut
dire de luy qu’il a des Sacrificateurs comme le dieu
de la Chaire persée en eut jadis chez les Anciens.

 

Mais quoy que l’on rencontre parmy les François
des Ames basses, qui donnent au vice ce qui
n’est deu qu’à la Vertu, qui logent les infames dedans
le Ciel, comme on y place les Heros ; il est
tres-certain qu’il y en a encore parmy nous qui
n’ont garde d’adorer l’Idole, quoy qu’elle soit toute
d’or. Il n’y a jamais eu de Siecle où la Vertu ait
eu moins de suiuans que le nostre, & c’est chez
nous que la Fortune a fait voir les marques de son



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