Anonyme [1649], LE ROMAN DES ESPRITS REVENVS A S. GERMAIN. , françaisRéférence RIM : M0_3559. Cote locale : C_9_86.
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pourroient inuenter toutes ensemble : D’autres, font
des Remonstrances au Parlement, pour l’animer encor
dauantage contre-moy : Quelques-vns me procurent
charitablement la haine du peuple, cõme si ie
n’en estois pas desia assez hay ; ceux-là font vn bruit de
tous les Diables à mes oreilles, cõme s’ils sonnoient le
toxin, pour émouuoir la populace à se ietter sur moy.

 

Quelques amateurs de ragousts me mettent au court
boüillon, & puis me laissent là sans me manger, pour
me faire plus grand dépit, disant, que ie ne vaut rien
ny à rostir, ny à boüillir : Il en est qui disent de moy
toutes les méchancetez imaginables au Roy, à la Reine
& à M. le Prince, qui ne sont pas presens & qui ne
les entendent pas, & toutesfois ils se promettent qu’ils
m’abandonneront, & me laisseront perir dans vne
guerre que i’ay allumée ; Et tous ont la forme de Religieux,
de Cheualiers, de Philosophes ou de Theologiens.
Ce sont là les plus malicieux, & ceux qui me
tourmentent d’auantage : Ie voy bien que ceux-là
vous donnent trop d’effroy, il en viẽt de plus gaillards
qui se presentent deuant moy, & qui font cent bouffonneries,
qui ne laissent pas de me fascher encor quelles
soient plaisantes.

Ceux-cy sont déguisez en Turlupins, en Pantalons
& Goguelus, qui me font cent niches & cent sornettes,
tantost ils me mettent entre deux Diables, puis
ils me rognent ma Soutane & mon Chapeau pour me
rendre semblable à eux, & m’appellent le Cardinal
burlesque, ils me font danser vne balade en cet estat,
& me dõnent tousiours quelque nazarde, ou quelque
sobriquet en passant qui ne me couste que le prendre :



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