Anonyme [1649], LE POLITIQVE CHRESTIEN. DE S. GERMAIN. A LA REYNE. , françaisRéférence RIM : M0_2811. Cote locale : C_6_59.
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de commettre des pechez dans ce Royaume ; Puisque la
Paix nous abandonne, & que la misericorde du Ciel, qui auoit
accoustumé de venir au secours de nos afflictions, semble nous
auoir delaissé ; puisque Dieu mesprise nos larmes & nos souffrances,
/> & qu’il n’a plus que de la Iustice pour chastier nos crimes.
Nous auons creu que nous deuions luy offrir des pleurs &
des sanglots, que nous deuions penser seurieusement à la conseruation
de cette Monarchie, & de son Prince, & procurer de toutes
nos forces par l’assistance de IESVS, le salut des Peuples.

 

C’est ainsi, MADAME, que parloient ces sages Prelats de
la France : Et c’est ainsi que nous croyons deuoir parler à Vostre
Maiesté. La veritable cause des maux que nous auons soufferts,
que nous souffrons maintenant, & que nous deuons apprehender
de souffrir à l’aduenir, c’est le peché qui a irrité Dieu : c’est
l’iniustice, qui a ietté le desordre dans tous les Ordres de ce
Royaume : Le remede c’est le restablissement de la Iustice &
des bonnes mœurs en toutes les parties de l’Estat. Deux des
plus grands Roys qui ayent iamais gouuerné le Peuple de
Dieu, Iosaphat & Ezechias, en ont vsé de la sorte, en occasion
pareille. Ils ne se contenterent pas de faire des Edicts pour reformer
les abus de leur Royaume : mais encor ils enuoyerent
par tout des Commissaires extraordinaires, d’vne probité reconuë
& incorruptible, pour les faire executer. Ils ne desisterent
point, que leurs sainctes Ordonnances ne fussent entierement
obseruées. Et cela produisit vn tel effect, qu’vn Estat qui estoit à
la veille de sa ruine, deuint le plus puissant, & le plus florissant
du monde.

Veritablement, MADAME, il faut qu’il y ait quelque chose
de diuin & de surnaturel en nos maux : car s’ils auoient pris
naissance d’vn principe ordinaire, la prudence humaine auroit
peu les preuoit & les preuenir : Ou si elle n’auoit peu ny l’vn ny
l’autre, du moins auroit elle trouué quelque expedient pour les
faire cesser. Mais cela est bien estrange qu’on voie encor multiplier
les mal-heurs, par les mesmes moyens qu’on employe
pour les estouffer. On voit que les remedes ne seruent qu’à irriter
les estouffer. On voit que les remedes ne seruent qu’à irriter
le mal. Les difficultez se sont produites les vnes les autres,
& se sont enueloppées d’autant plus qu’on les a voulu desbroüiller.
Nos desastres ont esté grands dans leur principe, ils l’ont
esté dauantage dans leur progrez, & nous deuons craindre que



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